Devin Townsend: Addicted!

Devin Townsend (ou, pour être plus précis dans ce cas, “The Devin Townsend Project”, mais on ne va pas chipoter) est un de mes grands malades préférés. C’est pourquoi j’attendais avec un intérêt certain Addicted!, son nouvel album – et ce d’autant plus que le précédent, Ki, sorti également cette année, ne m’avait convaincu que d’une chose: que je n’aurais pas dû l’acheter.

Dans le titre, le point d’exclamation est très important (il y en a partout, on se croirait sur un forum), parce que Devin Townsend s’exclame beaucoup. OK, techniquement, on est plus près des hurlements de fauve que des exclamations de gentleman. C’est le style Townsend: un gros métal qui tache, avec une ambiance cyberpunk (boucles de synthé, vocoder) remise au goût du jour, et le Devin qui hurle façon hystérique qui se serait coincé le patrimoine dans la braguette.

C’est clair qu’il faut aimer ce genre de sonorité, qui rappelle un peu Faith No More, beaucoup Ministry (dans les mauvais jours), avec un côté cartoon que je trouve personnellement hautement réjouissant. Dans le cas présent, Devin Townsend s’est également adjoint les services d’Anneke van Giersbergen, précédemment chanteuse de The Gathering; les deux s’étaient d’ailleurs déjà croisés, musicalement du moins, sur les projets d’Ayreon.

Lire plus

Monkey3: Undercover

Aujourd’hui, laissons de côté les méta-considérations sur les avantages comparés de la musique numérique – même si elles font sauter tous mes compteurs – et repartons dans les fondamentaux avec Undercover, le nouvel album des Lausannois de Monkey3. Par “fondamentaux”, j’entends le bon vieux rock bien pêchu de nos grands-mères.

Classé dans le post-rock, Monkey3 flirte également avec le rock psychédélique à la Hawkwind et cet album en est une brillante démonstration, par cinq reprises (plus un grand classique) revues et corrigées sauce primate.

Il y a là du Pink Floyd (“One Of These Days” ébouriffant), du Led Zeppelin (“Kashmir”, encore plus plombé que l’original), du Kiss (“Watching You”) et du Deep Purple (“Burn”). Le tout débute par un énormissime “Numb”, d’Archive; je ne connaissais pas le groupe ni la chanson originelle, mais cette reprise est une voiture de course muni d’une lame de chasse-neige: gare devant!

Lire plus

Guilt Machine: On This Perfect Day

Arjen Anthony Lucassen, le prodige danois du rock progressif, est de retour avec On This Perfect Day, de Guilt Machine ! Ce nouveau projet sonne, euh… exactement comme tous les précédents projets de Lucassen.

Bon, ce n’est pas exactement vrai. S’il est plus sombre, peut-être plus métal et intégrant des sonorités que ne renieraient pas un groupe comme OSI: voix enregistrées, rythmiques indus sur les bords, le rock progressif de Guilt Machine est clairement à la hauteur de son nom.

Mais il s’agit plus là d’un habillage un peu trompeur: le cœur musical reste clairement dans le même style que les autres œuvres de Lucassen ces quinze dernières années: Star One, Stream of Passion ou Ayreon. C’est reconnaissable entre mille, que ce soit dans les riffs, les orchestrations ou dans l’abus de vocaux passés au vocoder.

Lire plus

Blind Ego: Numb

Blind Ego: Numb

Blind Ego est le projet “solo” de Kalle Wallner, guitariste de RPWL, et son album Numb est un surprenant mélange d’influences prog et néo-prog. Le plus surprenant est que ce mélange, loin d’être un assemblage douteux de pompages musicaux plus ou moins inspirés, possède une personnalité propre qui est intéressante.

Ceci expliquant sans doute cela, on retrouve sur l’album des noms de musiciens comme John Mitchell (It Bites, Arena et Kino), Paul Wrightson (Arena) et John Jowitt (IQ, Jadis et Arena aussi; tiens tiens…).

Ce n’est du coup pas très étonnant que plusieurs morceaux sonnent comme de l’IQ , avec une touche métal prononcée. On est cependant loin des mélodies rentre-dedans d’Arena; Blind Ego fait plus dans l’introspectif – il y a aussi une influence Porcupine Tree notable, mais je suppose que c’est l’époque qui veut ça.

Numb propose une palanquée de morceaux (onze au total) aux titres monosyllabiques, qui sont à prendre sur la durée: aucun ne sort réellement du lot, mais tous ont au moins un petit quelque choses, une touche de génie plus ou moins claire qui apparait après plusieurs écoutes. Ce n’est pas le grand essorage de neurones, mais plus une balade dans un paysage connu, mais qui révèle quelques surprises bien senties à qui sait faire attention.

Lire plus

Theocracy: Mirror of Souls

Mirror of Souls, le nouvel album du groupe américain Theocracy, est une preuve supplémentaire qu’en matière de métal progressif, tout ce qui brille n’est pas or. En l’occurence, l’étiquette n’est pas complètement usurpée, mais on n’est quand même loin de l’inventivité d’un Dream Theater (pour citer un nom au hasard).

L’album propose plutôt un florilège de power-métal moderne, raisonnablement carré et avec beaucoup de virtuosité; au passage, si vous ne supportez pas les thématiques chrétiennes, passez votre chemin! Les morceaux font souvent plus de six minutes avec une (grosse) pointe à 22 minutes pour le morceau titre.

Fort heureusement pour l’auditeur blasé que je suis, il y a plus que la longueur des morceaux pour justifier l’étiquette “progressif”: que ce soit dans l’usage d’harmonies vocales ou l’usage de sonorités inhabituelles (la mandoline de “Martyr”, par exemple), Theocracy s’aventure dans des chemins bien souvent ignorés du métaleux moyen et c’est tant mieux.

Lire plus

Pain of Salvation: Linoleum

Je vais être bref et franc (qui a dit “ça nous changera”?): Linoleum, le nouvel EP de Pain of Salvation, ne me branche pas. Ce n’est pas un mauvais album, mais je trouve qu’il concrétise une direction prise par le groupe depuis Scarsick qui laisse derrière elle à peu près tout ce je trouvais de génial dans ce groupe.

Exit les passages scandés à la Faith No More, des morceaux moins complexes et plus dans le moule des standards métal progressif. Avec des albums comme Remedy Lane ou l’extraordinaire BE, Pain of Salvation était un groupe unique. Avec Linoleum, il me donne l’impression de rentrer dans le rang.

J’avoue: cet album me déprime un brin. Je sais qu’il a été composé dans des circonstances particulières, nées de l’incertitude faisant suite à la faillite de SPV, maison-mère de leur maison de disque Inside Out, et de l’annulation de leur tournée américaine. Je sais également que ce n’est qu’un EP, quatre morceaux apéritifs (je ne compte pas les deux “bonus”, surtout parce qu’ils n’apportent vraiment rien) avant la sortie de Road Salt en 2010.

Lire plus

Rammstein: Liebe ist für alle da

Or donc, Rammstein était en concert à Genève il y a pas longtemps. Mais, comme j’ai raté ma chance d’avoir des billets, je ne les ai pas vus; c’est dommage: il paraît que c’était très bien (mais je me suis vengé avec Isis). En cadeau de consolation, j’ai acheté Liebe ist für alle da, le dernier album studio du groupe.

Résumons ainsi: c’est une maigre consolation. Je soupçonne que Rammstein est bien plus un groupe de scène que de studio. Certes, leurs prestations live (en disque ou en vidéo) auraient dû me mettre la puce à l’oreille: gros effets pyrotechniques, gros son et cabotinage en règle. Dans une autre vie blogesque, j’avais comparé Rammstein avec des clowns en bottes à clous et lance-flammes; force est de constater que ce genre d’accessoires se transpose assez mal en audio seul.

Que reste-t-il donc? Du gros métal indus qui tache, façon “insulte-moi en allemand”, de la provoc’ à deux balles (un clip classé X, une chanson censurée en Allemagne et un coffret promo contenant six godemichés roses translucides, entre autres blagues) et une poignée de morceaux qui éveillent en moi un quelconque intérêt: “Rammlied”, “Waidmanns Heil” ou “Pussy”. Beaucoup de bruit pour pas grand-chose, au final.

Lire plus

Sylvan: Force of Gravity

Sylvan est un groupe allemand de néo-prog que j’ai découvert il y a quelques temps et pour lequel j’avoue volontiers un petit – OK, un gros – faible. Il y a quelque chose dans leurs compositions qui me rappelle le Marillion des grandes années. Leur dernier album, Force of Gravity, laisse apparaître une volonté d’aller plus loin que leurs habitudes musicales, ce qui n’est pas fait pour me déplaire non plus.

Isis à Genève

Isis Genève 08

J’en ai tellement pris plein les oreilles hier au concert d’Isis au Kab de l’Usine de Genève que je dois résister à la tentation d’écrire en gras et en majuscule. Ça, plus le fait que c’était un putain de bordel de nom de bleu de concert qui dépote!

Je dois avouer que je ne m’y attendais pas: je voyais Isis comme un groupe de post-rock presque comme les autres, avec quelques guitares râpeuses, un chanteur qui alterne growl et vocaux “propres” et c’est un peu tout.

Monumentale erreur! Isis, c’est un rouleau compresseur conduit par un colibri, un astéroïde façonné comme un œuf de Fabergé, un bombardement stratégique composé par Vivaldi. C’est un mur de son qu’on se prend en pleine face et, juste avant l’impact, on s’aperçoit que chacune des briques est une mosaïque représentant une fresque avec la finesse d’un grand maître flamand.

Je pourrais continuer longtemps avec les images foireuses, mais, pour résumer, c’est un putain de groupe de métal avec trois guitares en façade qui alterne des plages de pure brutalité et des moments de grâce musicale – un peu comme le chanteur et son style growl et propre. Mention spéciale au batteur, absolument prodigieux tout au long du set.

Lire plus

Fractal: Sequitur

C’est une fois encore sur la recommandation de Prog-résiste, le prozine belge qu’il est bien, que j’ai acquis l’album Sequitur de Fractal (attention: ce lien contient du MySpace). À lire la critique, je m’attendais à quelque chose d’un tantinet barré et je n’ai pas été déçu du voyage.

Enfin, disons plutôt qu’il n’y a pas tromperie sur la marchandise: la musique de ces Californiens s’apparente clairement à King Crimson – et pas la période la plus calme de ce groupe. En grande partie instrumental, Sequitur donne plutôt dans le non-sequitur musical, avec des morceaux savamment déconstruits, qui proposent des décrochages acrobatiques à côté de plages plus mélodiques. On y trouve même, avec “Bellerophon”, six minutes que n’aurait pas renié le Tangerine Dream de la fin des années 1970.

Le gros défaut de cet album, c’est que je ne suis pas un grand fan de King Crimson; j’apprécie à petites doses, mais guère plus. Du coup, je le recommande volontiers aux amateurs du genre, mais pas forcément aux amateurs d’un rock progressif plus traditionnel (encore qu’on peut m’opposer le fait que, pour le rock prog, King Crimson est traditionnel).

Lire plus

Russian Circles: Geneva

Les mauvaises langues prétendront que la seule raison qui m’a poussé à acheter Geneva, le dernier album du trio post-rock Russian Circles, c’est un sentiment localo-nationaliste mal placé. Menteries pas vraies et erronées! J’ai également acheté le précédent, Station, mais il se trouve que celui-ci est le dernier en date.

Gazpacho: Tick Tock

Pour une surprise, c’est une excellente surprise que ce Tick Tock des Norvégiens de Gazpacho! Surprise, car leur précédent album, Night, avait été présenté comme un chef d’œuvre par beaucoup de critiques – sauf par moi, qui l’avais trouvé franchement plat. Tick Tock, inspiré par le roman “Terre des Hommes”, de Saint-Exupéry, est à peu près tout sauf ça.

S’il fallait résumer en une phrase la musique de Gazpacho, je dirais que c’est quelque chose comme du Marillion première période Steve Hogarth (genre Holidays in Eden ou Afraid of Sunlight) avec des surprises musicales. Grandes plages instrumentales très atmosphériques, inclusion de violons, chant lancinant (la voix de Jan Henrik Ohme rappelle vraiment beaucoup celle de Steve Hogarth).

C’est clair qu’avec une telle influence, on ne peut pas vraiment dire que l’ensemble est d’une folle originalité, mais Gazpacho sait y faire et, après une intro à la U2, ses compositions s’enchaînent sans faille et sans temps mort, tissant une ambiance particulière et ma foi fort plaisante. En fait, on peut presque détacher le premier et le dernier morceau et ne garder que les deux parties de “The Walk” et les trois de “Tick Tock” comme un seul morceau de plus de 35 minutes.

Lire plus

Shadow Gallery: Digital Ghosts

J’aurais aimé pouvoir dire du bien de Digital Ghosts, le dernier album de Shadow Gallery. J’aurais aimé pouvoir dire qu’il me rappelle les grandes heures d’un Carved in Stone, d’un Tyranny ou même d’un Room V.

Shadow Gallery a toujours été un groupe un peu à part, naviguant aux frontières du métal progressif et symphonique, avec des grandes envolées musicales et des harmonies vocales omniprésentes. Pas exactement le style le plus facile à maîtriser et Digital Ghosts le prouve.

C’est dommage, parce que cet album, en partie conçu comme un hommage à Mike Baker, leur ancien chanteur décédé en 2008, aurait mérité mieux.

Sans être mauvais, je trouve Digital Ghosts peu inspiré. S’il a ses moments de brillance (“Haunted”), il est très convenu, très en-dessous de ce que Shadow Gallery a produit de par le passé; certains morceaux (notamment “With Honor”) me donnent même l’impression d’être joués par un cover-band qui essaye de faire comme les vrais n’y arrive pas vraiment.

Lire plus

VIII Strada: La Leggenda della Grande Porta

Amis musiciens de rock progressif, tendance néo-prog, je ne vous souhaite qu’une chose: que votre premier album sonne aussi bien que ce La Leggenda della Grande Porta, de VIII Strada! Certes, dans le cas de ce groupe italien, il y a un truc: ça fait dix ans qu’ils existent et ont déjà un EP à diffusion confidentielle à leur actif.

Coup d’essai, coup de maître? Sans doute: cet album, qui affiche des fortes influences IQ et Marillion, est une splendide carte de visite. Dans le genre, on y retrouve toutes les recettes d’un prog d’excellent facture: une instrumentation sans faille qui flirtent parfois avec le prog-métal, des mélodies ciselées et complexes juste ce qu’il faut, et un excellent chanteur (Tito Vizzuso), passionné et énergique.

Ce n’est certes pas d’une folle originalité, mais quel groupe de néo-prog peut prétendre l’être? Pour ma part, j’avoue être tombé sous le charme de cet album, chaudement recommandé également dans le Prog-résiste 57. Même les vocaux chantés en italien, qui en tant normal m’enthousiasment autant qu’un album d’Eros Ramazzotti, s’accommodent fort bien de l’atmosphère dégagé par VIII Strada.

Lire plus

Leaves’ Eyes: Njord

Normalement, j’aurais dû faire un billet sur une de mes dernières trouvailles en prog, fruits du dernier numéro de Progrésiste, mais il se trouve que Njord, nouvel album de Leaves’ Eyes, s’est entre-temps installé dans mes esgourdes pour y laisser une forte impression. C’est sur la recommandation de Greewi, mon comparse en rôlisterie et en modération de forum, que je me suis intéressé à ce groupe norvégien de métal symphonique à chanteuse intégrée – et ce, je dois l’avouer, non sans une certaine réticence.

J’en ai déjà causé en long, en large et en travers: le genre est, à mon avis, saturé de groupes médiocres alors que, par son essence, il tolère mal la médiocrité. Cependant, Leaves’ Eyes soutient aisément la comparaison avec ses glorieux aînés, tous plus ou moins nordiques, et propose un métal symphonique de fort bonne qualité et avec, sinon de l’originalité (ne rêvons pas), tout au moins un caractère propre. Rien que pour cela, il mérite notre attention.

L’album Njord, comme son nom l’indique à peu près, est d’inspiration viking et, nonobstant des photos de ses membres qui se la pètent façon GNistes avec des grosses épées, l’ambiance y est.

Lire plus

Transatlantic: The Whirlwind

Une des glorieuses habitudes du rock progressif, c’est l’échangisme musical et la création de “supergroupes” qui en résulte. C’est mieux que de maladies, même si le résultat n’est pas toujours souhaitable. Il y a une trentaine d’année, UK ou Asia tenaient le haut du pavé; aujourd’hui, on parle plus volontiers de Transatlantic, dont le nouvel album, The Whirlwind, vient de sortir après presque dix ans d’attente.

En matière de pointures, c’est du lourd: Neal Morse (Spock’s Beard, Neal Morse Band), Mike Portnoy (Dream Theater et un million de side-projects), Pete Trewavas (Marillion) et Roine Stolt (The Flower Kings, The Tangent). Le style est un néo-prog symphonique très enlevé, clairement marqué par la patte de Neal Morse, qui assure les voix avec Roine Stolt.

Le gros défaut des supergroupes, à mon avis, c’est que l’exercice tient pour une bonne part de la bande de copains qui s’amusent et, dans les mauvais jours, du plan marketing (même si, au niveau “devenir riche”, le rock progressif a beaucoup de points communs avec le jeu de rôle). Dans le cas de Transatlantic, c’est clairement la première option qui prime, ce qui est en un sens heureux. Cela dit, avec The Whirlwind, on a un peu l’impression d’assister à une jam-session entre potes qui se connaissent depuis des lustres et qui, tout à leurs ébats musicaux, oublient le public.

Lire plus