Il y a peu, je me suis lancé dans un projet un peu fou: refaire du jeu de rôle. Oui, moi aussi, ça me surprend: ça doit faire au moins vingt ans! Ou deux, c’est selon. Bref, j’ai proposé du Château Falkenstein.

Mes joueurs, c’est un peu le Tigres Volants Canal Historique. Je joue avec certains d’entre eux – enfin, certaine – depuis presque aussi longtemps que j’ai commencé le jeu de rôle. Et leur style de jeu est… particulier.

Disons qu’ils voient plus le jeu de rôle comme un prétexte à la déconne que comme un truc en mode « on joue, là, c’est sérieux ». Et bon, soyons honnête: c’est un style qui me va bien aussi.

Bon, dans l’absolu, avec Château Falkenstein, il y a un peu de dissonance, du coup: sans aller jusqu’à dire que c’est un monde très sérieux, il pose quand même un contexte où les apparences et les formes ont de l’importance.

Pour lancer la machine, je leur ai proposé une « session zéro ». Le principe, c’est qu’avant de commencer le jeu proprement dit, on discute des personnages, (on les crée ensemble), du contexte et de ce qu’ils avaient envie de faire. Moi, je n’ai rien dit. Enfin, si, j’ai aussi lancé quelques idées, mais principalement je les ai laissé faire ce qu’ils voulaient.

Du coup, on se retrouve avec un micro-état germanique, au bord de la Mer intérieure – un des rares qui n’ait pas encore été avalé par Bismarck. Pour rire, j’ai proposé d’en situer la capitale à Sankt Goarshausen, petit village entre Francfort et Coblence situé non loin du site de la Lorelei.

Au centre de l’histoire, il y a un sous-marin. Parce que quelqu’un au gouvernement, qui avait trop lu Jules Vernes, a décidé que ça serait bien d’avoir une marine moderne. Oui, dans ce contexte, ça veut dire steampunk. Il a donc créé un comité ad hoc: le Comité Unternehmung.

Unternehmung, c’est donc le nom du navire. Ça veut dire « entreprise ». Et le navire en question est clairement un truc qui a été conçu par un comité.

C’est un sous-marin. Enfin, la partie « descente », ça va; c’est pour remonter que c’est plus aléatoire. Il est équipé de deux pièces d’artillerie de marine d’un calibre pas raisonnable. Lors des rares essais de tir, des bouts du navire se sont désolidarisés du reste. Et il a chaviré.

Il a également des moteurs de forceur de blocus, ce qui peut paraître une bonne idée, sauf que les gouvernes ont été réduites parce que quelqu’un trouvait ça peu esthétique. Il y a d’autres absurdités, comme un cachot pouvant retenir vingt personnes et un dispositif censé le transformer en dirigeable, mais que personne n’a encore osé tester.

Et donc, les personnages ont décidé de le voler. De voler l’Entreprise, donc.

Les personnages, c’est la princesse du coin, qui n’aime pas son mari et a des envies d’indépendance contrariées par son statut et par la gendarmerie locale. Elle est fortement inspirée de Tiabeanie, de Disenchantment.

C’est aussi une naïade, descendante de la Lorelei originelle, qui a décidé d’embrasser la carrière de pirate; c’est plus pratique pour couler les bateaux quand on ne sait pas chanter.

Enfin, c’est Herr Dr. Ing. Grimm, nain de sa nature, ingénieur du navire. Il est passablement frustré par plusieurs années de gestion du Comité et de l’incurie aristocratico-bureaucratique qui a la mainmise sur le projet. Avant l’arrivée de la princesse et de la pirate, il était déjà à deux doigts de lancer une mutinerie.

Où est-ce que tout ce bazar va aller? Je n’en sais rien. J’ai quelques idées de péripéties, mais je laisse les joueurs s’amuser dans le bac à sable et je leur pique leurs idées. Par exemple, quand un des joueurs dit « je suis sûr qu’il y a des espions dans l’équipage », je note « tous l’équipage sont des espions ».

Sans aller jusqu’à dire que Château Falkenstein est le jeu parfait pour ce genre d’approche « bac à sable », il a plusieurs atouts. Notamment des mécaniques de jeu très simples (tellement simples qu’elles ont tendance à déstabiliser un peu les joueurs, moi-même y compris).

Il n’y a guère que toute la partie combat et magie qui est plus complexe, mais on n’a pas de magicien dans l’équipe et je pense gérer les combats de façon très « à la louche ». Ne me parlez pas des règles de duel, par exemple…

Peut-être le plus compliqué, c’est de gérer le contexte: l’époque victorienne n’est pas triviale. Bon, techniquement, aucune époque n’est triviale quand on la regarde un peu sous le nez.

Mais dans le cas présent, il y a tous les aspects géopolitiques (le micro-royaume pas encore assimilé par la Prusse, dont le prince consort est bavarois), sociaux (deux des personnages sont des femmes), etc. Disons que ça donne des occasions d’interactions intéressantes; j’attends avec impatience le premier bal de la naïade.

Alors oui, ça va être silly, mais c’est normal: ça vient avec les joueurs. Moi le premier.

Photo: L’Orgue du « Nautilus » (prise par moi-même à Disneyland Paris il y a longtemps, NE ME JUGEZ PAS OKER); il y en a bien entendu un similaire à bord du Unternehmung.

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