La météo, radieuse la veille, nous gratifie d’ondées matinales. Rien de tel pour se réveiller de bonne humeur qu’une tente dont l’atmosphère est saturée d’humidité et des douches privées d’eau chaude. Qu’à cela ne tienne: on n’est pas là pour se la couler douce, y’a Night of the Prog, deuxième jour! Avec un programme de folie, en sus.
Retour donc à l’amphithéâtre un peu avant midi pour assister à la prestation de Luna Kiss, un quatuor venu de Grande-Bretagne qui joue un rock nerveux et musclé, entre prog et rock indé. C’est plutôt bien exécuté, mais ça ne me remue pas la petite cuillère, malgré la présence d’un Kelstone, un instrument à cordes exotique.
Haken joue ensuite. On pourrait se demander comment un groupe de ce niveau ne joue qu’en deuxième, la raison est que le reste de la programmation est également composée de monstres.
Je suis cependant déçu: le groupe se prend un peu les pieds dans la complexité de ses compositions; je dirais qu’il en fait trop. Ça reste plaisant, avec de très bons moments, mais à mon avis un ton en-dessous des albums, ce qui n’empêche pas que le public leur réserve une ovation monstre dans un amphithéâtre déjà presque plein.
Sylvan monte sur scène, accompagné d’une réputation mitigée. Entendez par là que j’ai entendu des échos de concerts soit très bons, soit très mauvais. Seul groupe allemand programmé cette année, ils jouent donc devant un public entièrement acquis à leur cause.
La prestation est plutôt convaincante, centrée principalement sur Home, mais joue beaucoup sur le mélodrame. Le chanteur en fait des tonnes, ce qui gâche un peu le spectacle– et encore, je vous ai épargné les photos avec ses pires grimaces.
Arrive alors Lazuli. Il faut savoir trois choses: d’abord, sur scène, ce sont des tueurs; ensuite, le public du Night Of the Prog est un des meilleurs du monde; enfin, Lazuli, ce sont des tueurs. Et, du coup, le spectacle que les Français proposent est probablement l’expérience la plus intense du week-end.
Les frères Leonetti et leurs acolytes envoient du bois par forêts entières, principalement avec des titres de leur plus récent album, et s’amusent à de l’échangisme instrumental avant de conclure par leur traditionnel jam sur vibraphone, toujours aussi spectaculaire. Lazuli vainqueur par bombe atomique!
The Enid, je les ai suivis de loin. Pas que leur prestation ait été particulièrement mauvaise, mais c’est loin d’être mon groupe préféré et il arrive un moment où ma petite santé – plus particulièrement les papattes qui crient “au secours!” – impose des choix.
Au reste, ce n’est pas une prestation qui incite à l’hystérie collective: le progressif symphonique du groupe – qui aligne aussi près de quarante ans de carrière – est très bizarre et pas très rock, ressemblant à une version sous acide de chansons Disney, avec sur scène des timbales gigantesques et un chanteur-danseur. Ce n’est pas forcément désagréable, mais ce n’est pas mon truc.
Riverside, déjà plus. Retour donc sur le devant de la fosse – enfin, autant que faire se peut, parce que je ne suis pas le seul à avoir eu cette idée – pour saluer Mariusz Duda et sa bande. Le groupe envoie son rock progressif moderne et mordant, avec un véritable medley de morceaux courant sur toute la carrière du groupe, y compris “Discard Your Fears”, tiré du prochain album Love, Fear and the Time Machine.
Alors qu’il y a quatre ans, j’avais trouvé leur prestation plutôt statique, le groupe semble avoir gagné quelques niveaux en charisme. Et d’ailleurs, le groupe est clairement un des chouchous du public.
En parlant de charisme, c’est à Fish que revint l’honneur de clore la soirée. La dernière fois que j’avais vu le bonhomme en concert, je crois que c’était en 1987 au festival open-air de Leysin. Il a un peu changé. Pas forcément en mal, d’ailleurs: ce qu’il a perdu en cheveux et en voix, il l’a gagné en barbe poivre et sel et également en présence scénique. S’il commence par quelques morceaux de sa propre carrière solo, il entame vite le cœur du sujet: Misplaced Childhood.
Je vais être clair: il m’est impossible d’être objectif sur cet album. La tournée doit être le deuxième concert auquel j’ai assisté, alors même revisité par Michel Sardou, je serais au premier rang à hurler les paroles; je les connais à peu près par cœur après trente ans. Alors oui, il y a beaucoup à dire sur l’aspect technique de cette interprétation, mais pour ce qui est de l’émotion, c’est un sommet.
Et fuck pour la nostalgie, j’en reprendrais quand même une louche! Et avec un “Market Square Heroes” pour conclure.
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