Au début de Attack Surface, dernier roman de Cory Doctorow, une spécialiste de la sécurité informatique se trouve dans un pays de l’ancien bloc soviétique en proie à des manifestations populaires contre le pouvoir en place.
Attack Surface est un roman qui se situe dans la continuité de Little Brother et de Homeland. Sauf qu’ici, Cory Doctorow nous donne un aperçu de l’autre côté. Et cette protagoniste-narratrice n’est autre que Masha, qui s’était opposée à Marcus auparavant (et s’était fait casser quelques phalanges dans le processus).
Après avoir travaillé pour le Department of Homeland Security, elle s’est reconvertie dans le « privé » – les guillemets étant là pour signifier que ce sont souvent des compagnies qui sont financées par la CIA et qui bossent pour l’Oncle Sam.
Mais si, d’un côté, elle contribue à la mise en place de technologies de surveillance avancées et intrusives pour le compte des autorités, de l’autre elle aide un petit groupe d’opposants en leur inculquant les principes d’une sécurité opérationnelle numérique.
Masha a donc une conscience, même si cette conscience est sérieusement atténuée par le confort de sa position et un cynisme qui arrêterait des neutrinos. ce qui n’empêche pas que, lorsque les choses tournent au vinaigre, elle est démissionnée par son employeur.
De retour à San Francisco, elle reprend contact avec une amie qui est impliquée dans un mouvement dans la lignée Black Lives Matter. Et qui, pour cela, se retrouve dans le collimateur de la police d’Oakland – et des anciens employeurs de Masha.
Si vous suivez ce blog depuis un moment, vous avez sans doute noté que j’aime beaucoup ce qu’écrit Cory Doctorow. Cela dit, mes chroniques sont rarement sans un bémol de taille: en fait de romans, j’ai plus l’impression de lire des chroniques où, au final, il ne se passe pas grand-chose.
Ce n’est pas le cas des bouquins du « Littlebrotherverse ». Avec Attack Surface, Cory Doctorow se détache de son héros « jeune adulte » pour prendre le point de vue d’une protagoniste nettement plus ambiguë. Je ne pense pas divulgâcher beaucoup en vous disant que c’est un peu l’histoire de sa rédemption.
Comme souvent, les idées que développe Cory Doctorow dans Attack Surface sont impressionnantes en elles-même. D’autant qu’ici, on ne parle pas de science-fiction, mais de notre présent – enfin, disons, de notre présent pré-pandémie. Surveillance globale, activisme, voitures autonomes transformées en armes, privatisation de la police et de l’armée, etc.
Mais ici, l’ensemble est traité à la mode techno-thriller, avec des enjeux glaçants et des personnages forts – surtout des personnages féminins. Masha elle-même est une narratrice plutôt divertissante, mais son amie Tanisha est pas mal non plus, sans parler d’Ange, la désormais-épouse de Marcus, qui est clairement le cerveau du couple.
Ce qui est surtout impressionnant, c’est que Cory Doctorow dresse un tableau sombre, limite noir, de la lutte entre les activistes et les opérateurs gouvernementaux qui veulent les surveiller, mais tout en parvenant à y placer une note d’espoir.
J’aurais quelques points plus négatifs à mentionner sur l’ensemble, notamment l’abus de flash-backs qui parfois cassent le rythme de façon brutale et ont failli me perdre une ou deux fois. Mais globalement, Attack Surface est un excellent roman.
Cory Doctorow ne l’a pas publié sous licence Creative Commons, mais il a lancé un financement participatif pour la version électronique et audiobook. C’est comme ça que je l’ai reçu, d’ailleurs.
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