Cette fois-ci, c’est la bonne! Le mois passé, une bronchite tenace m’avait empêché de voir Bruit ≤ en concert en première partie d’Alcest à Lausanne, mais trois semaines plus tard, ils repassent aux Caves du Manoir de Martigny, accompagnés sur cette date par Jisei.
Et donc, en route pour Martigny, petite ville du Valais sise au « coude » du Rhône. Et retour aux Caves du Manoir, une des salles les plus roots de Suisse romande. Et la plus « comme son nom l’indique », puisque ce sont littéralement les caves d’un manoir du XVIIe siècle. J’ai également appris que c’est la plus ancienne salle de concerts de Romandie, ouverte en 1977, et la deuxième plus ancienne de Suisse, excusez du peu!
Dans un premier temps, vers 20 h 30, c’est Jisei qui monte sur scène. Il s’agit d’un projet solo de Bertrand Pot, guitariste du groupe Herod, qui ici tripatouille synthés et samples. Pendant un peu plus d’une demi-heure, il nous propose une synthwave aux inspirations Vangelis (il va même jouer une reprise de la BO de Blade Runner), avec des sonorités qui me rappellent un peu le space-rock.
Ce n’est pas le truc le plus original qui m’ait été donné d’écouter, mais c’est une musique qui passe bien, avec un côté sombre et inquiétant et beaucoup d’intensité. Je me suis souvenu de la première fois que j’avais vu The Algorithm sur scène et je me dis que Jisei donnerait encore mieux avec une vraie batterie. Mais, en l’état, j’ai bien aimé et, faute de CD, je vais aller jeter une oreille sur Bandcamp et je vous en reparlerai sans doute prochainement.
Vers 22 h, Bruit ≤ arrive au milieu d’une logistique impressionnante: multiples guitares et basses, une batterie gigantesque (avec une grosse caisse qui donne l’impression d’avoir mangé les autres grosses caisses), plus un violon, un violoncelle et un orgue, le tout augmenté par trois racks de pédales avec lesquels on devrait pouvoir lancer une frappe nucléaire. En plus, les racks sont tunés, avec des rampes de LED; certains Valaisans ont dû être jaloux.
En venant au concert, je me suis fait une séance de révision, en réécoutant les deux albums et l’EP que je connaissais. Après cinq minutes de concert, j’en ai conclu que je n’avais jamais écouté Bruit ≤. J’entends pas là que la musique du groupe est très différente en live: les glitchs sont à peu près absents, mais les musiciens jouent avec une intensité démultipliée, comme s’ils étaient possédés par la musique. Plusieurs fois, j’ai bien cru que j’allais me prendre la basse dans l’œil. Et du coup, même les compositions les plus calmes prennent une dimension épique.
Certes, la configuration de la salle y est pour beaucoup: on ne joue pas aux Caves du Manoir comme si on était sur la grande scène d’un festival – ou même aux Docks. Mais leur prestation m’a rappelé à quel point le post-rock est un animal très différent en album et en concert. Depuis le temps, je devrais le savoir.
Et donc Bruit ≤ y a joué pendant une petite heure. La setlist comptait l’intégralité du dernier album, The Age of Ephemerality, plus quelques pistes des deux autres, notamment « The Machine Is Burning » en rappel. Le public était présent en nombre, remplissant les Caves du Manoir. Petit regret: le groupe a raté l’occasion de rendre un hommage à « l’enfant du pays », Bernard Montangero, né à Saint-Maurice il y a presque un siècle et qu’on peut entendre dans l’EP Apologie du temps perdu Vol. 1 (et non pas « anthologie », comme je le dis dans la vidéo). J’en ai discuté ensuite avec les musiciens, qui m’ont avoué ignorer le détail.
C’est aussi un des aspects très sympas de la salle: il est très facile d’y discuter avec les musiciens. J’ai même réussi à trouver du merch de Bruit ≤, ce qui n’était pas gagné vu qu’ils sont en fin de tournée et que leurs stocks sont très limités (bonne chance pour trouver des tailles autres que du S ou du M).
J’ai fini par rentrer vers minuit; j’avais pris un hôtel sur place, d’une part pour éviter la galère des trains de nuits qui prennent trois heures et demie pour faire un trajet de deux heures et, d’autre part, parce que je voulais passer à Alterfictions avant de rentrer. Mais je pense que j’étais tellement excité par l’énergie du concert que je n’ai pas pu fermer l’œil avant deux heures du matin. C’est l’effet Bruit ≤.
Comme d’habitude, vous pouvez retrouver ce live-report en vidéo Radio-Erdorin, sur YouTube et sur Peertube. Je vous ai également préparé une petite cinquantaine de photos sur Flickr, sous licence Creative Commons (CC-BY).
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