À ce stade, peut-on encore classer Enslaved dans le black-metal? Est-ce pour autant devenu un groupe de metal progressif? Et est-ce qu’on s’en fout pas un peu, des étiquettes? Telles sont les question que l’on peut se poser en écoutant Utgard, leur nouvel album.
Résumons: à l’origine, Enslaved était un des groupes phares de la scène black-metal norvégienne. La vraie, la dure, celle qui sent le soufre et l’église brûlée. Avec un côté pagan-folk en prime, pour faire viking.
Mais, depuis maintenant une bonne dizaine d’années, le groupe s’est orienté vers des compositions plus mélodiques, voire inspirées par le rock progressif. Tout en gardant une bonne partie de son identité musicale black et folk. Hier, « black-metal progressif » était une blague. Mais ça, c’était hier.
Utgard aligne neuf pistes et quarante-cinq minutes. Les forts en math auront vite calculé que ça fait une moyenne de cinq minutes par titre, ce qui n’est pas complètement à côté de la plaque. En fait, il y a une piste de moins de deux minutes et les autres sont entre quatre minutes et demie et six minutes et demie.
La première chose qui frappe, à l’écoute de cet album, ce n’est pas une grosse hache nordique manipulée par un berserker, mais plutôt l’incroyable diversité stylistique des compositions. Rien que sur « Fires in the Dark », on a des du chant hurlé, du chant clair éthéré, des accents folk, des grosses guitares et des claviers planants aux sonorités vaguement vintage. Rien que.
L’album contient également le très classique « Homebound », peut-être le plus accessible des morceaux (ce qui ne veut pas forcément dire qu’il est très accessible, notez), un quasi-pop « Distant Seasons », voire des épisodes électro (sur le début de « Urjotun »).
Et ne croyez pas qu’il s’agisse d’un accident malencontreux – « je nettoyais mon orgue Hammond, le coup est parti tout seul ». Un peu tout Utgard est sur ce mode « gros mélange ». C’est surprenant. Moins surprenant, certes, quand on suit l’évolution d’Enslaved sur les vingt dernières années (même si, pour ma part, je ne les ai découvert qu’avec Vertebrae, en 2008).
Le souci avec les groupes qui mélangent plein de trucs, c’est que ce n’est pas toujours très compatible. Ou, à tout le moins, pas toujours très convaincant. Soyons honnête: il y a des grumeaux. Et même si on passe outre, Utgard n’est à mon avis pas l’album le plus facile à approcher si on n’a pas un solide bagage musical.
Ceci posé, globalement, il y a de belles choses dans cet album. Le cocktail black-prog donne souvent lieu à des ambiances particulièrement réussies; les extrêmes se renforcent et donnent parfois naissance à des choses nouvelles et originales. Et il faut avouer que c’est un tour de force assez impressionnant de mélanger ces deux styles sans que tout le bazar ne vous pète à la tronche.
Je reconnais cependant qu’après déjà six albums de ce calibre, la surprise s’émousse un peu. Cependant, Utgard est un album qui mérite qu’on s’y intéresse, si on cultive le goût pour les musiques extrêmes et expérimentales. Vous pouvez d’ailleurs le trouver sur Bandcamp.
Bonus: la vidéo de « Jettergryta »
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Perso je sais pas si il y a des grumeaux mais en tout cas ça tamise bien comme morceau. Merci à toi.
Sur la vidéo, ça va, mais il y a des trucs qui frisent bien plus le nawak.