La question de la criminalité sur Internet a toujours été un sujet sensible et j’ai un peu été surpris de voir Cory Doctorow lui-même recommander, sur BoingBoing, l’ouvrage de Nate Anderson, The Internet Police.
Après lecture de l’ouvrage en question, je comprends la recommandation: c’est un livre remarquablement bien écrit, très bien documenté et au point de vue équilibré. Ce n’est pas très étonnant quand on sait que son auteur officie d’habitude sur le site Ars Technica.
Sous-titré “How Crime Went Online, and the Cops Followed”, The Internet Police est principalement l’occasion de revenir sur tout un pan de l’histoire d’Internet – un vieux, genre datant du XXe siècle. Et d’exposer, en toile de fond, l’opposition entre, d’une part, les tenants d’un Internet dérégulé et du chaos créatif et, d’autre part, ceux qui en appelaient à un “Internet civilisé” – pour reprendre les termes de Nicolas Sarkozy (qui a d’ailleurs droit à un portrait assez peu flatteur).
En exposant un certain nombre de cas devenus célèbres (surtout au USA), comme HavenCo, le site pédophile The Cache, l’affaire Jammie Thomas et, plus près de nous, Megaupload et Silk Road, l’auteur décortique le jeu du chat et de la souris auquel se livrent criminels et forces de l’ordre, les outils qu’ils emploient et, pour les seconds, les défis posés en terme de droit et de vie privée.
J’ai appris pas mal de choses en lisant The Internet Police – notamment le fait que Tor (originellement The Onion Router) était un projet de l’US Navy. Ce qui illustre assez bien les paradoxes que soulèvent la question: beaucoup des outils de chiffrage et de sécurisation ont des applications parfaitement légitimes et, inversement, ce n’est qu’une question de temps avant qu’un outil d’intrusion développé par les forces de l’ordre ne tombe entre des mains criminelles.
J’ai apprécié le point de vue équilibré de l’auteur, qui prend bien soin d’exposer les différentes facettes des opérations de maintien de l’ordre et les questions de respect de la vie privée. Si cet ouvrage devait avoir un défaut, c’est que ce panorama date d’avant les révélations d’Edward Snowden et, du coup, en le lisant aujourd’hui, il perd un peu de sa pertinence.
S’il apparaît comme un gros pavé, The Internet Police ne fait guère que 250 pages, les cinquante restant étant composées des notes, références et index. C’est donc un ouvrage qui se lit vite et qui a un réel intérêt pour ceux qui s’intéressent à Internet et à ses aspects les moins ragoutants.
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Ca a l’ait intéressant, effectivement.
Celui-là, je l’ai au format “arbre mort”, je pourrai donc te le prêter à l’occasion.