Récemment, je suis tombé sur un bout d’informations à la télé. Hormis le fait que ça me rappelle pourquoi j’apprécie de moins en moins regarder les informations à la télé, j’ai été estomaqué d’entendre le commentateur parler du “prix des mesures antipollution”.
Parce que, curieusement, si les mesures antipollution ont un prix, la pollution, elle, ne semblait pas en avoir. Limite si on ne nous disait pas que ces salauds du gouvernement contraignaient le pauvre automobiliste à abandonner son droit divin à transformer la planète en une grosse boule grise.
Cela fait déjà un moment que je me suis aperçu qu’on ne paye quasiment jamais le vrai prix des choses. Le génie du capitalisme – en tous cas dans le modèle néo-libéral mondialisé qu’on nous sert depuis plus de trente ans – est d’avoir externalisé ses coûts sous des formes qui ne sont pas immédiatement apparentes, parce que trop loin ou trop insidieuses.
Le problème, c’est que, tôt ou tard, la facture va nous revenir dans la gueule, avec les intérêts. La pollution est un premier signe (encore qu’on ne se souvient pas forcément des alertes au smog du XXe siècle; on devrait), il y en aura d’autres. Ce n’est pas vraiment un hasard si une étude récente, financée par la NASA, pointe vers une fin de la civilisation alimentée par des contraintes économiques et sociales de plus en plus insupportables.
Notre planète devrait s’en remettre raisonnablement bien, merci pour elle – tout du moins, à son échelle: quelques millions d’années. Notre civilisation, voire notre espèce, elle, est partie pour s’en prendre plein la tronche, et pas pour pas un rond.
Si j’ai de la chance, je ne devrais plus être là pour voir cela. Mais il n’empêche que ça me bourre: il se trouve que, dans son ensemble, j’aime plutôt bien l’humanité. Il y a certes un certain nombre de spécimens dont le seul intérêt à mes yeux est d’être biodégradable (eux), mais je ne suis pas un grand fan des punitions collectives.
Même si, objectivement, nous sommes tous un peu responsables de nos choix de société, il y a quand même un certain nombre d’entre eux qui sont d’autant plus haïssables qu’il me paraissent être le fait d’une poignée de zigotos. Et, pour ne rien arranger, ces zigotos (zigoti?) qui n’ont que le profit à court terme en ligne de mire, ont profité de cet état de fait à un point qui leur donne quasiment tous les pouvoirs. La sociopathie, ça rapporte.
En d’autres termes, les pyromanes ne sont même plus pompiers: ce sont eux qui décident des normes anti-incendies. Et qui nous envoient la facture. Le fond du problème est là: les gens qui sont responsables de ce merdier seront sans doute les derniers à en subir les désavantages et, du coup, ils n’ont ni envie de, ni intérêt à changer les choses.
On est très mal.
(Photo par Justin Stahlman via Flickr sous licence Creative Commons.)
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Excellent article, je n’aurai pas pu mieux résumer.
Un des problème sous-jacents c’est que le prix n’est pas intuitif, nos sens sont incapables d’estimer le risque d’une pollution, son impact. Mais on s’entête à vouloir approcher le problème avec intuition et sentiments, en se basant sur un système légal qui juge les intentions plus que les effets.
Oui, ou pire: tu laisses le marché définir le prix de la pollution et tu te retrouves avec l’incroyable arnaque du prix des émissions de carbone.
Effectivement, le pluriel de zigoto est zigoti, mais le singulier d’abrutis n’est pas abruto.