Je suppose que je ne surprendrai personne en disant que j’attendais ce Paradis Posthumes, le nouvel album de Galaad, avec une impatience mal dissimulée. Cette attente valait-elle la peine?

Spoiler: OUI!

(Au passage, je vous préviens de suite: je vais faire mon fanboy et cette chronique est kilométrique.)

Galaad est donc un groupe de rock progressif suisse, originaire de la région de Moutier – donc officiellement jurassien depuis peu. Assez clairement ancrée dans le néo-prog, avec un chant en français de Pierre-Yves Theurillat (Pyt pour les intimes), leur musique a pris pas mal de muscle depuis le précédent album, Frat3r.

Avec Paradis Posthumes, Galaad ne fait pas semblant: onze pistes et un peu plus d’une heure. Si la plupart des compositions tournent entre quatre et six minutes, trois d’entre elles dépassent les huit minutes.

Le souci majeur de Galaad, c’est que le groupe est surtout connu pour un album: Vae Victis, Du coup, un peu tout est jugé à cet aune. Ça n’est pas toujours facile de succéder à un chef d’œuvre.

Sans aller jusqu’à dire que Paradis Posthumes arrive à ce niveau, il monte très très haut. Encore que: en écoutant Vae Victis aujourd’hui, il y a quand même des trucs qui piquent un peu et qui passent surtout parce que le Galaad de 1994 avait une patate atomique.

Cela dit, niveau patate, ce nouvel album ne fait pas semblant. Galaad a sérieusement musclé son jeu et l’ensemble est beaucoup plus péchu que sur Frat3r.

Déjà, Paradis Posthumes commence par un « Terra » qui évoque un peu Ennio Morricone (comme l’on mentionné beaucoup de chroniques), mais aussi Magma, avec son chant en latin. Il enchaîne avec un premier quasi-epic, « Apocalypse », qui mérite bien son nom.

Première respiration avec « Moments », qui a été également le premier morceau de l’album révélé par le groupe. Les trois pistes suivantes, « Le rêve d’unité », « Amor Vinces » et « La douleur » me laissent une impression mitigée.

C’est un peu le cas aussi pour « L’instinct, l’instant » et « Ton ennemi », mais avec un sentiment plus positiv, du fait de l’énergie du premier et la construction du second.

« Paradis Posthumes », c’est presque le « single naturel » de cet album: une piste courte, simple, enlevée et lumineuse. Suit le deuxième quasi-epic de l’album, « Jour sidéral », particulièrement émouvant puisqu’il s’agit d’un hommage de Pyt à son père disparu. C’est presque le pendant symétrique de « Apocalypse ». L’album se conclut par un « Divine » qui est plutôt sympathique.

Bon, pour être très honnête, il y a plusieurs passages de Paradis Posthumes qui ne fonctionnent que c’est parce que c’est Galaad derrière. Affirmation à comprendre de deux manières: d’une part, tout autre groupe se serait sans doute banané et, d’autre part, je suis également prêt à leur passer beaucoup de choses.

Je dirais que le plus gros défaut est dans les parties chantées. Oui, c’est une critique assez récurrente chez moi. Pas que la voix de Pyt pèche, bien au contraire, mais il semble se laisser embarquer par son propre enthousiasme et prolonge des parties chantées parfois plus longtemps que confortable. L’exemple peut-être le plus extrême se trouve dans des pistes comme « L’Instinct, l’instant ».

Si je devais pinailler, je dirais aussi qu’il y a quelques passages qui montrent une un peu trop grosse influence Marillion (période Fish); rien de tragique, mais ça peut en gêner certains. Plus ennuyeux, j’ai l’impression que la production aurait pu être un peu plus claire et plus musclée aussi; mais si ça se trouve, c’est plus de la gourmandise de ma part.

Cela dit, il n’y a aucune piste de l’album qui ne contient pas au moins un passage qui transcende tout le reste. C’est très impressionnant de ce point de vue. Là encore, j’ai conscience qu’il y a beaucoup de ma fanboyitude qui parle ici.

En plus de l’énergie, j’ai été particulièrement marqué par les textes de Pyt. Plusieurs des pistes de de Paradis Posthumes jouent sur des concepts mystiques souvent très bien vus (je pense surtout ici à « Apocalypse » et à sa vision de Jésus).

En me rappelant des pistes jouées lors du concert d’Yverdon, l’année passée, j’ai l’impression que Galaad a assez peu changé de choses par rapport aux versions finales. En tout cas, elles étaient toutes très reconnaissables. Ce qui me fait dire que le groupe a été ici plus à son aise pour la composition de ce nouvel album. Et ça s’entend.

Paradis Posthumes est un album solide, avec assez peu de moments faibles et une énergie impressionnante. Galaad confirme à la fois son grand retour – pour les derniers qui en doutaient – et sa place de groupe majeur dans le rock progressif francophone.

Bonus: la vidéo de « Moments »

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