Dans le petit monde un peu ronronnant du post-rock, peu de groupes sont venus récemment renverser la table, comme Bruit ≤ l’a déjà fait et le refait encore avec ce nouvel album, The Age of Ephemerality.

Je pense que je surprendrai personne en annonçant que Bruit ≤, actif depuis 2018, est originaire de la région de Toulouse. Le coin est un vivier hors statistique pour les musiques progressives et avant-gardistes, un peu tout ce qu’est le groupe avec une musique instrumentale entre post-rock, électro et néoclassique.

Si The Age of Ephemerality n’est que leur deuxième album, le groupe a aussi à son actif un certain nombre d’EP. Cet album est d’ailleurs plutôt court, avec un peu plus de quarante minutes. Il compte cinq pistes de trois, sept, huit, neuf et treize minutes.

J’avais découvert le groupe avec leur premier album, The machine is burning and now everyone knows it could happen again – encore un titre qui tient de la profession de foi – et j’avais dès le départ été happé par l’ambiance de leur musique. Ce qui est probablement la raison pour laquelle le groupe a eu la gentillesse de m’envoyer celui-ci en service presse.

Et question ambiance, on est une fois encore servis! The Age of Ephemerality part sur une base qui mélange un post-rock urgent et une électro volontiers glitchée (parcourue d’anomalies auditives) et y rajoute des éléments de musique de chambre des montées en puissance épiques et des extraits sonores parfois incongrus, parfois inquiétants (et souvent les deux à la fois). Ah oui, et ils ont aussi coutume d’enregistrer dans des églises.

Tout ceci donne des paysages sonores blindés de contrastes, qui évoquent tour à tour la folie d’un monde qui court vers son autodestruction (« Data », un peu à la Koyaanisqatsi), des passages mélancoliques parcourus de distorsions (« Progress / Regress »), un ensemble à cordes et des cuivres (« The Intoxication of Power », qui se conclut par une citation de Georges Orwell).

Et je dis bien des paysages, des tableaux construits, même s’ils sont parfois eux aussi « glitchés », comme si on regardait des souvenirs enregistrés il y a très longtemps et que le temps aurait corrompu. La construction est maîtrisée, mais qui peut maîtriser le temps qui passe?

Je connais peu de groupes qui sont capables de générer une telle charge émotionnelle avec leur musique. Un album de Bruit ≤, même un EP, je le reçois toujours comme un événement et The Age of Ephemerality ne fait pas exception bien au contraire. Je ne doute pas qu’il sera très haut dans mon top de 2025 et je vous le recommande avec une urgence à la hauteur de celle de sa musique. L’album est sur Bandcamp.

Et pour ma part, je vais de ce pas réserver mon billet pour leur venue à Lausanne en première partie d’Alcest en octobre.

Bonus: « The Intoxication of Power » enregistré trente mètres sous la ville

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