On y suit les exploits de l’as allemand Walter Murnau dans le ciel de 1946, alors que l’arrivée de nouveaux jets et d’autres armes secrètes a stoppé net le débarquement en Normandie. D’entrée de jeu, le ton est donné: chasseurs à réaction Lippisch P13A contre bombardiers américains B-29 puis, plus tard, les ailes volantes Horten Ho 229, le Focke-Wulf Ta 183 et même, dans un coin, le Triebflügel. Le dessin est alerte – un peu desservi par des onomatopées essouflées – l’impression première est plutôt bonne.
Sauf que. Bon, OK, “sauf que tonton Alias” serait la façon la plus diplomatique de dire les choses. Disons-le ainsi: j’ai déjà lu beaucoup mieux; le problème des uchronies, c’est qu’assez rapidement, on s’habitue à la très haute qualité. Dans mon cas, les travaux de 1940: La France continue (qui a donné le livre Et si la France avait continué la guerre), qui montrent assez rapidement (études historiques récentes à l’appui) que l’Allemagne nazie n’était pas le colosse que l’on décrit, mais un panier de crabe régulièrement à la limite de l’implosion.
En d’autres termes, imaginer que, même en cas d’échec du D-Day, les Allemands auraient eu la force d’arrêter l’avancée alliée et, surtout, soviétique, ne tient pas debout. Un des gros problèmes allemands, c’était que pour chaque chasseur à réaction, les Alliés alignaient dix tromblons à hélice et les Soviétiques vingt; ça, plus le fait que la logistique suivait à peine en tant normal. Et puis imaginer l’état-major nazi comme une entité soudée tient un peu du fantasme.
Bref, pour moi, la suspension d’incrédulité ne fonctionne pas; au moins, avec Le Grand Jeu, on sait tout de suite qu’on est dans un créneau d’aventures entre le pulp d’avant-guerre et le Bob Morane d’après, avec tout ce que ça comporte d’éléments superscientifiques et fantastiques. Encore que, en lisant entre les lignes, on peut deviner qu’il y a des choses vraiment pas claires dans le contexte qui sert de trame à Wunderwaffen – ne serait-ce que par la présence de Jacques Bergier (et non Pierre Berger…), co-auteur du Matin des Magiciens.
Cela dit, je m’en voudrais de trop casser cette bande dessinée. Pour résumer, j’ai des standards de fou furieux quand on parle d’uchronie, surtout Seconde Guerre mondiale (encore que j’en connais des bien pires que moi…). En faisant abstraction de mes râlaisons de pinailleur historiomane, ce premier tome de Wunderwaffen a du potentiel et, pour les amoureux d’avions bizarres, c’est un vrai bonheur.
2 commentaires sur “Wunderwaffen, tome 1: Le Pilote du Diable”
Bonjour,
Merci pour cette critique;
Vous êtes le premier critique à subodorer qu’il se cache des choses pas “catholiques” dans l’univers de WW… Bien. Mais c’est Jacques Bergier et non… Pierre Berger (qui serait bien étonné de se retrouver là…) que j’ai le plaisir de mettre en scène…
Autre chose, la “charnière temporelle” ne repose pas que sur le D Day raté. Disons que je la mets en avant parce que ça parle au grand public.
Cordialement,
RDN
Argh! Oui, Jacques Bergier. Honte sur moi!
Merci pour ce retour de retour.