On dirait bien que je suis en mode “suite”, ces jours. Parce qu’après le deuxième tome de Terra Ignota, je me suis attaqué au huitième de The Laundry, de Charles Stross, The Delirium Brief, lu à la suite de The Nightmare Stacks. On y retrouve ce genre Bob Oliver Francis Howard (non, ce n’est pas son vrai nom) dans une merde à grand spectacle. Littéralement.
Dans The Delirium Brief, la Laverie – l’organisation gouvernementale britannique secrète en charge de la gestion des événements paranormaux – va se retrouver confrontée à son pire ennemi: son propre gouvernement. Pour être plus clair, suite aux événements de Leeds, décrits dans The Nightmare Stacks, l’organisation n’est plus vraiment secrète.
C’est un problème quand, d’une part, les politiciens cherchent un bouc émissaire pour ce qui est le plus gros désastre militaire sur terre britannique depuis la bataille d’Hastings et, d’autre part, l’existence d’une officine gouvernementale non privatisée attise les appétits des décideurs.
En soi, ce n’est déjà pas une bonne nouvelle, encore moins quand lesdits décideurs obéissent à une entité venue d’au-delà de l’espace et du temps. Et le démantèlement de la Laverie n’est que le début d’actions bien plus néfastes, que Bob et les quelques survivants de l’organisation vont bien devoir contrer – avec l’aide d’alliés inattendus.
Ce sera d’ailleurs l’occasion de revoir passer quelques têtes connues des précédents volumes – et, au passage, d’apprendre quelques secrets biens sanieux sur les opérations de la Laverie. Mais l’histoire est surtout centrée sur Bob, Mo, son ex-ex-épouse, et Mahri, ainsi que le Senior Auditor Michael Anderson; l’inénarrable Cassie (la princesse elfe du tome précédent) revient également, accompagnée d’Alex.
Autant The Nightmare Stacks était plutôt léger, jusqu’à la grosse bataille finale – un peu à l’image de The Rhesus Chart – autant The Delirium Brief est tendu du début à la fin. La dissolution de la Laverie en tant que telle donne un coup de pression majeur aux personnages et, partant, à l’intrigue. Autant dire que, comme l’avait souligné François en commentaire de ma chronique précédente, on y rit beaucoup moins.
En marge de l’histoire de The Delirium Brief, il y a aussi Charles Stross qui règle ses comptes avec les délires du néo-libéralisme débridé et de ses méthodes de gestion publique qui passent exclusivement par un bradage en règle des institutions vers des officines privées. Rien de nouveau sous le soleil, pour qui s’intéresse au sujet, mais la démonstration est glaçante.
Je ne sais pas si c’est le retour de Bob comme narrateur, mais Charles Stross a fort heureusement laissé de côté sa tendance, dans les deux précédents volumes, à empiler les descriptions kilométriques de procédures bureaucratiques et/ou militaires absconses.
Je ne vais pas vous refaire l’article à chaque fois: j’aime beaucoup cette série et je vous conseille instamment de vous y intéresser si vous aimez le mélange fantastique-contemporain avec des gros bouts d’humour britannique et geek par-dessus.
Par contre, plus que jamais, ce n’est pas le livre avec lequel commencer. Avec ce tome, la série de la Laverie entre en plein dans le CASE NIGHTMARE GREEN annoncé depuis le début – le retour des dieux anciens – et on sent que ça ne va pas être propre.
Au passage, et en conclusion, je vous conseille de lire le dernier en date de l’auteur, sur l’écriture de fiction très longue haleine. Même si on n’est pas auteur, il y a pas mal de détails intéressants à garder en tête. Et, après avoir lu ce tome, vous pouvez également consulter le “crib sheet” de l’auteur, avec plein de parallèles fascinants (mention spéciale pour la comparaison entre les œuvres de Lovecraft et le Anarchist’s Cookbook).
D’autres avis chez L’Affaire Herbefol, Anudar, Reflets de mes lectures, et peut-être d’autres encore.
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J’avais lu le premier volume et malgré ses qualités, j’avais été refroidi par le protagoniste, ce modeste informaticien qui est aussi espion, séducteur, as de la gâchette et physicien nucléaire. Est-ce que ça vaudrait la peine que je m’y remette?
Je suis assez étonné parce que question séduction c’est une quiche. Après moi j’aime beaucoup mais c’est dû à mon côté geek contrarié / anti-Lovecraft primaire.
Cela dit, il est possible que tu aies été trompé par le deuxième, The Jennifer Morgue, qui joue sciemment sur les clichés jamesbondiens – même si Bob s’aperçoit au milieu de l’histoire qu’il n’est pas le héros, mais plutôt la James Bond Girl…
Non, j’ai lu la traduc du Bureau des atrocités. Je dois simplement mal me souvenir du livre, je pense. J’avais été tellement chiffonné par l’ultracompétence du personnage principal à l’époque que j’ai gardé le souvenir qu’il plaisait à tous les personnages féminins du bouquin, apparemment à tort.
Je ne me souviens pas beaucoup mieux du bouquin, note, j’ai dû le lire il y a plus de dix ans.