Marya Petrovna embarque, avec plusieurs autres passages, à bord du Transsibérien. Dans son sac, un guide: The Cautious Traveller’s Guide to the Wastelands, qui donne son nom à ce roman de Sarah Brooks. Car ce train ne traverse pas seulement des grandes étendues glacées, mais surtout un territoire étrange et dangereux.

En effet, sur cette Terre alternative située à la fin du XIXe siècle, quelque chose a transformé les terres entre Chine et Russie. Les vastes étendues sont devenues un lieu mortel, peuplé de créatures étranges, et que seuls les rails du Transsibérien permettent de traverser sans danger.

Pardon: presque sans danger. Le précédent voyage a été marqué par un incident… dont personne ne se souvient, mais qui a valu au père de Marya, concepteur des fenêtres du train, une disgrâce. Marya, qui ne croit pas à la thèse officielle, embarque donc sous un faux nom pour découvrir la vérité.

Elle n’est pas seule à voyager sous un faux prétexte: le docteur Henry Gray, un scientifique britannique lui aussi tombé en disgrâce et rongé par la maladie, cherche à prouver ses théories. Des théories qui flirtent plus avec le mysticisme qu’avec la science, d’ailleurs.

Et puis il y a les passagers et l’équipage du train. Au premier rang desquels Weiwei, « l’enfant du train », née à bord et qui y a vécu toute sa vie. Moitié mascotte, moitié femme à tout faire, elle va recueillir une passagère clandestine qui va tout changer. Littéralement.

The Cautious Traveller’s Guide to the Wastelands est un ouvrage qui pourrait tout à fait rentrer dans la catégorie « merveilleux scientifique » des auteurs du début du XXe siècle. Aujourd’hui, on dirait « steampunk », mais c’est à mon avis un peu court.

Du steampunk, le roman reprend le côté fantastique, le monstrueux train – qui rappelle plus les cités mobiles de la Compagnie des Glaces que l’élégant Orient-Express – et la séparation sociale. Séparation accentuée par le fait que le train a une Première classe et une Troisième classe, mais pas de Deuxième classe.

Mais il joue également avec le vieux cliché de la Civilisation (forcément bienveillante) et de la Nature (forcément hostile). Et si la société ne semble pas être si raciste que ça, la peur de l’Autre est ici symbolisée par les Wastelands (les Terres oubliées dans la version française).

Je pourrais disserter longtemps sur les parallèles et les symboles de The Cautious Traveller’s Guide to the Wastelands. Sérieusement: fût un temps où j’étais plutôt doué en dissertation. Mais le souci est que j’en viendrais rapidement à divulguer des éléments clés de l’histoire et ce serait un peu dommage.

Parce que ce roman, qui flirte également avec le post-apo, mérite d’être lu et d’être vécu comme le voyage qu’il raconte. L’écriture est fluide, les personnages intéressant et la tension très présente tout au long de l’ouvrage, jusqu’à sa conclusion – très ouverte et étonnamment satisfaisante. Merci à Nicolas Winter pour son article dans le blog Juste un mot, qui m’a incité à le lire.

Il a été traduit en français sous le titre Comment voyager dans les Terres oubliées.

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