Ce samedi, on a enfin pu reprendre la partie de Lady Blackbird, commencée il y a quelques mois et interrompue par la fatigue extrême d’un des joueurs, que je ne citerai pas ici pour ne pas mettre la honte à mon beau-frère. Pour l’occasion, Madame et Monsieur Cuchulainn se sont joints à l’aventure, respectivement dans le rôle-titre et dans celui de Cyrus Vance, le capitaine contrebandier.
Pour l’occasion, j’ai fait un peu de rétropédalage en admettant, a posteriori, que les deux susnommés avaient été séparés des trois autres qui, ça tombait bien, était plus ou moins les sous-fifres de l’histoire. Le temps de libérer tout le monde et les personnages étaient partis à travers les entrailles du vaisseau de guerre, poursuivis par les soldats impériaux (insérez ici musique de Star Wars, chantonnée en chœur par un peu tout le monde) et, après un passage épique dans la salle des machines pour saboter les moteurs du croiseur, ils parviennent à déjouer l’embuscade tendue par les vils suppôts de l’Empire, récupèrent leur coucou (qui s’appelle Le Hibou, mais c’est un détail) et s’enfuient, pendant que les machines du croiseur, poussées à fond, explosent en libérant d’intenses volutes de vapeur.
Je vous passe la suite des événements – à commencer par la découverte que personne n’avait pensé à faire le plein – sinon pour dire que c’était en grande partie de l’impro. Qui a dit “comme d’habitude?”…
Cette séance de plus longue durée, et surtout avec le casting complet et d’autres joueurs que mon trio de cinglés habituels, m’a permis de cerner un peu mieux les forces et (surtout) les faiblesses du système de jeu. Les miennes aussi, en fait. La première constatation est que l’improvisation, ça ne s’improvise pas. Ou, pour être plus précis, qu’il est toujours bon d’avoir un minimum de préparations – quelques notes, des pistes, des idées, des PNJ, ce genre de chose. Pour le coup, j’ai sans doute un peu péché par légèreté dans la préparation de la partie, ce qui fait que la fin a été un peu bâclée.
L’autre point est qu’autant je sens bien ce système et cet univers pour les scènes d’action, autant pour tout ce qui est social et enquête, ça me paraît plus difficile. À vrai dire, j’ai encore pas mal de difficulté à voir comment utiliser le système: lancer des dés pour tout et n’importe quoi ou lancer un dé pour une scène-clé. Par exemple, il y a eu un combat où j’ai demandé plusieurs jets et un autre – un duel à l’épée entre Lady Blackbird et un chasseur de primes retors – qui s’est réglé en un seul jet (fort bien réussi, certes, mais au temps pour l’épique).
Si les joueurs se sont bien amusés dans l’ensemble, ils ont eu un peu de mal avec le concept de réserves (pools) de dés et le système de remplissage (refresh) qui semble nécessiter des scènes de roleplay, mais ce n’est pas très clair. Je soupçonne que c’est surtout une question de gestion et d’habitude: les systèmes auxquels nous jouons d’habitude n’utilisent pas (ou très peu) le concept de réserve de dés.
L’autre défaut est qu’il est apparu assez vite que les personnages sont quelque peu déséquilibré vis-à-vis de leurs Clés. Les clés sont les buts individuels des personnages, liés à leur mission ou à leur caractère; atteindre une de ces clés lors d’une action ou d’une scène permet de gagner un dé de réserve ou un point d’expérience. Bonne idée au demeurant, mais j’ai cru voir, au cours de la partie, que ceux des personnages qui ont des clés plus orientées action (“faire une action dangereuse”, “protéger Lady Blackbird” ou “se battre contre un ennemi supérieur en force et en nombre”) sont plus à même de les activer que ceux qui ont des clés plus sociales, comme “amoureux transi” ou “imposteur”. C’est sans nul doute un défaut qui est en grande partie dû à notre style de jeu – voir plus haut.
J’ai également choisi de faire en sorte que le MJ ne lance jamais les dés. C’est un parti pris que j’avais déjà pris comme base dans Tigres Volants lite et qui marche ici plutôt bien (comprenez “plutôt mieux que dans Tigres Volants lite“). Ce n’est pas très évident, car ça demande un changement majeur dans les habitudes de jeu, mais ça permet de penser l’action comme tournant autour des personnages, pas des PNJ. Ce qui, au vu de mon lourd passif sur ce sujet, est sans doute une excellente chose.
Au final, je pense que Lady Blackbird est un jeu qui a les défauts de ses qualités: en voulant faire un jeu ultra-minimaliste et très ouvert, les auteurs ont laissé beaucoup de travail dans les mains du meneur de jeu moyen: outre le scénario qui est vraiment évanescent et réduit à quelques idées de scènes, le système lui-même demande pas mal de travail de clarification (et une bonne dose de test sur le terrain, à défaut d’exemples) avant d’être réellement jouable.
Et les personnages, me direz-vous? Ils sont toujours sur la piste d’Uriah Flint, le Roi-pirate, entretemps capturé par Lord Crawford, l’ex-futur époux de Lady Blackbird. Parviendront-ils à le retrouver? Vous le saurez au prochaine épisode! Peut-être…
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