Avant de parler de l’article ‘Host your own’ is cynical, de tante.blog, je dois dire que j’ai beaucoup de respect pour les gens qui font tout eux-mêmes, y compris – et, sans doute, surtout – dans le domaine de l’informatique. Principalement parce que moi, j’ai du mal, pour rester poli.

Par contre, j’ai beaucoup de mal avec le snobisme do-it-yourself, qui consiste à dire que ceux qui n’y arrivent sont des branlos ou des moutons. Principalement pour les mêmes raisons, d’ailleurs; personne n’aime se faire traiter de branlo ou de mouton.

On a beaucoup entendu les fondamentalistes de la solution auto-hébergée se gausser bruyamment des utilisateurs de Google Reader ou de Tumbler, après l’annonce de l’arrêt programmé du premier et du rachat du second par Yahoo!. Il existe des alternatives à ces services (commerciaux et fermés, ce qui est bêrk-caca).

C’est vrai. C’est aussi, soit non-trivial à installer, soit pénible à configurer, ou alors très incomplet par rapport aux fonctionnalités attendues (et on ne s’en rend compte qu’après avoir galéré des plombes pour installer le bazar). Parfois, c’est les trois ensemble; très rarement, tout se passe bien.

Mes expériences, dans ce domaine (comme la confection d’un hackintosh ou l’installation de WordPress et d’autres babioles sur mon serveur), s’apparentent souvent à 90% de frustration en sandwich entre 5% d’enthousiasme initial et 5% de satisfaction finale. Et je ne compte que ceux qui se sont résolus au final.

Alors bon, désolé: je peux vous convertir un logo vectoriel en vingt-sept formats différents, dont douze obsolètes, sans perte de qualité ou de couleurs ou vous mettre en page un jeu de rôle de plus de trois cents pages sans trop couiner. HTML et CSS je gère à peu près et j’arrive péniblement à comprendre PHP (surtout quand j’ai bu), mais me battre avec les configs Apache ou les fichiers .htaccess, désolé, mais ça je ne sais pas.

De façon générale, l’informatique n’est pas quelque chose de trivial. On peut croire le contraire, parce qu’elle est devenue ubiquitaire en une vingtaine d’années, mais tripoter Word ou Excel à longueur de journée, ce n’est pas “faire de l’informatique”, de la même façon qu’utiliser un toaster n’est pas faire de l’ingénierie électrique.

Certes, il existe des outils qui simplifient la programmation ou la configuration de serveurs, mais, pour faire une autre comparaison, c’est pas parce qu’on sait se servir de Word pour faire des zoulis rapports en deux colonnes, avec couverture couleur et encadrés, que l’on est un graphiste professionnel.

L’informatique, comme le graphisme, est un de ces métiers où l’apparition d’outils très puissants accessibles au grand public a rendue floue la frontière entre amateur et professionnel: n’importe qui peut faire du graphisme et en conséquence, n’importe qui est graphiste, de nos jours. Mais si la frontière est floue, elle est toujours existante.

La différence, c’est qu’il est rare qu’une catastrophe graphique ait d’autre résultat que des yeux qui piquent et une campagne de comm’ ratée; par contre, se gaufrer dans une configuration de serveur, c’est l’assurance d’avoir un site instable, planté – voire pire: ouvert à tous les vents et “zombifié” par un botnet.

Je ne sais pas si c’est une forme d’élitisme ou, au contraire, de l’humilité mal placée, mais autant le mouvement open-source/do-it-yourself/makers et assimilés m’intéresse et, d’une certaine façon, m’attire, autant cette attitude qui prétend que c’est la solution et que ceux qui ne l’utilisent pas sont des imbéciles est au final méprisante et me rebute. Et je soupçonne que je ne suis pas le seul.

Il y a une raison pour laquelle le commun des mortels n’utilise pas les alternatives open-source et/ou auto-hébergées à Google, Facebook, Apple ou Microsoft: dans la plupart des cas, elles sont ardues à mettre en place et/ou elles n’offrent pas les mêmes fonctionnalités. Il est temps que ceux qui les soutiennent à grands cris descendent de leur tour d’ivoire (même open-source et sortie d’une imprimante 3D) et s’attachent à les rendre plus accessibles s’ils veulent voir leur usage se répandre.

(Au passage, on notera, avec le titre de cet article, l’importance de la présence d’un trait d’union dans une phrase.)

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