Les Anthinoises, ce n’est pas seulement un marché médiéval, un Castel des Trolls regorgeant d’artistes et de joueurs (et de bière) et des animations diurnes. Le soir venu, c’est aussi – surtout, dirons les amateurs – des concerts de musique celtique et celtisante, avec une programmation éclectique et métissée, n’en déplaise aux chancres de la tradition pure et dure.
La dernière édition nous avait déjà valu quelques beaux numéros, 2016 ne déroge pas à cette pratique. Même si je n’ai pu voir qu’une grosse moitié des groupes programmés au Chaudron des Trolls – la grande salle sous chapiteau ouverte le soir –, la faute à mon hypotolérance calorique (traduction: j’avais froid) du samedi et à un départ avancé le dimanche, ce que j’ai vu m’a plutôt favorablement impressionné.
Le vendredi a commencé avec les Churchlifters, un quatuor énergique anglo-saxon, mais résidant en Bretagne. Leur musique est un folk rock traditionnel, mais sur quelques instruments qui le sont moins : certes, il y a un violoniste et un batteur plutôt classiques, mais le guitariste a construit lui-même sa contrebasse (en métal) et ses guitares (dont une avec des enjoliveurs de Mercedes) et la chanteuse utilise des plateaux de cuisine en guise de tambourin. C’est un peu du folk-Ikea (ou Folkea), en quelque sorte.
Bricolage ou pas, leur musique est très entraînante et le groupe évolue sur scène avec aisance. En ce vendredi glacial – même sous chapiteau, notre souffle fait de la buée – la foule est plutôt clairsemée, mais réceptive.
Le groupe suivant est Taÿfa, une grande formation de rock berbère, avec chant en kabyle. Même s’il y a toujours eu une certaine parentée entre les musiques moyen-orientales ou nord-africaines et celles de culture celtique, Il faut un moment avant de saisir le rapport avec cette dernière, mais, après quelques morceaux plutôt orientalisants, apparaissent sur scène – plop! – un cornemuseur et un joueur de bombarde.
J’ai trouvé ce groupe très sympa, ce mélange berbère-celte est un style auquel je suis plutôt sensible. Le groupe a une expérience de la scène certaine, même si on avait parfois l’impression qu’ils étaient un peu intimidés par le public – qui était plus bruyant que réellement nombreux.
Mais l’attraction principale de la soirée, c’était les Violons Barbares. Là encore, on joue sur les mots et si le nom du groupe nous annonce du violon, le concert commence par un solo de percussions – impressionnant, certes, mais on se dit que ce n’est pas le propos. C’est un tort: le percussionniste forme la colonne vertébrale du trio, dont les deux autres membres sont violonistes: l’un bulgare et l’autre mongol.
Et, dans ce cas, quand on parle de violons, on a droit à deux engins traditionnels et qui, du coup, ont assez peu de rapport avec le crincrin lambda des formations habituelles. Ça pose déjà le côté exotique, mais on change carrément de dimension quand le violoniste mongol commence à alterner chant « normal » et chant guttural. Entre ça et l’énergie des compositions – « c’est une chanson d’amour » est le gag récurrent du set – la foule, qui est maintenant présente en masse, apprécie.
Il paraît que, samedi, il y avait aussi des bons groupes – comme Digresk, que Ghislain m’a décrit comme du folk joué façon métal et les Ramoneurs de Menhir, formé d’ex-membres des Béruriers Noirs – mais, comme expliqué précédemment, j’ai dû faire l’impasse pour cause de glagla.
Et c’est donc muni d’une veste en laine polaire supplémentaire que je reviens pour la dernière série de concerts, celle du dimanche. Celle-ci commence par de vieilles connaissances, les Bretons de Outside Duo avec leur folk traditionnel, mais délivré sous une forme très théâtrale, plus comme un duel entre violon et guitare que comme un vrai duo.
J’avoue: je suis fan de ce groupe. Musicalement, ce n’est pas très original – surtout comparé aux autres formations – mais c’est extrêmement énergique et très drôle. Le duo tient autant de la formation musicale que du sketch, avec des regards hallucinés, des échanges savoureux avec le public – y compris en descendant jouer dans la salle – et de grands moments de délire.
Avec de tels chauffeurs de salle, le groupe suivant n’a qu’à bien se tenir. Heureusement, c’est Kíla, une formation irlandaise avec plus de vingt ans de bouteille et sept musiciens sur scène, qui s’amusent souvent à s’échanger les instruments.
Avec un tel pedigree, on pourrait s’attendre à du folk irlandais classique, mais c’est un peu tout le contraire. Le groupe propose certes quelques morceaux traditionnels, mais le plus souvent, il mélange allègrement les influences world-music – africaines, orientales, latines, jazz et même gospel, avec de belles sorties a capella.
Alors voilà: cinq groupes sur neuf, ce n’est pas beaucoup. J’aurais bien aimé en voir plus, mais les circonstances étant ce qu’elles étaient, j’ai dû me limiter. N’empêche que, même si c’était peu, c’était quand même très bien!
Les photos sont enfin en ligne sur Flickr (depuis un moment, mais j’avais oublié de rajouter le lien).
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