“Strate-à-gemmes”, de Terry Pratchett

Cette chronique est à placer sous le signe de la honte: d’une part, Strate-à-gemmes est le premier livre de Terry Pratchett que je lis (Good Omens, écrit avec Neil Gaiman, ne compte pas vraiment), d’autre part, il a fallu que Fulgan me le colle d’autorité dans les mains pour que je l’ouvre (depuis qu’il fait de la musculation, je ne me sens pas trop de le contrarier) et, pour ne rien arranger, je l’ai lu en français.

Si l’histoire implique un monde en forme de disque, elle n’a que peu de rapport avec la série éponyme qui a rendu célèbre Sir Terence. On y suit Kin Arad, ingénieure pour la Compagnie, qui fabrique des planètes, et qui se fait embarquer plus ou moins de force (avec deux compagnons non-humains) pour explorer l’étrange monde plat, où la technologie semble équivaloir aux alentours de l’An Mil.

J’aurais pas mal à redire sur l’intrigue, qui est un peu lente à démarrer au début, confuse sur la fin et qui, de façon générale, ne m’a pas enthousiasmé plus que cela, mais je ne crois pas que ce soit la partie la plus intéressante de Strate-à-gemmes. Il contient par contre pas mal d’idées pour un monde de SF à haut niveau technologique, y compris sur des éléments d’économie pas mal bien vus.

Mais, à mon avis, le cœur de l’histoire, ce sont les personnages, leurs particularités et leurs plans idiots dans un monde médiéval-fantastique qu’ils ont du mal à comprendre. Deux esprits plutôt scientifiques, l’une ingénieure et l’autre anthropologue (et ursoïde), accompagnée par un pilote qui va vite se révéler être le bourrin de service, utilisant à profit ses quatre bras pour passer à travers – parfois littéralement – tout ce qui ressemble à de l’adversité.

Quelque part, j’ai l’impression de suivre une équipe de personnages de Tigres Volants en balade dans un monde à la Donj’ et ça, ça m’amuse beaucoup. S’y ajoutent, au-delà de la grosse dose d’humour, une réflexion sur la question d’un univers multiculturel et cosmopolite. En cerise sur le gâteau, on a des éléments uchroniques que je ne révélerai pas ici, mais qui donnent à ce roman non pas un, mais deux twists finaux – le second étant plus subtil.

J’ai donc plutôt bien aimé ce bouquin (publié originellement en 1981, 1997 pour sa version française). Pas assez pour avoir envie de me lancer dans l’intégralité du Disque-monde – qui est sans doute très bien, mais dont le sujet ne m’intéresse que moyennement, sans parler de la perspective de se taper quarante volumes – mais bien quand même. Je le recommande volontiers à ceux qui aiment la SF décalée.

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14 réflexions au sujet de ““Strate-à-gemmes”, de Terry Pratchett”

  1. J’ai toujours pensé qu’il fallait un jour ou l’autre que je lise du Pratchett, mais j’hésite, car je ne sais pas par quoi commencer. Tu penses que cet ouvrage est une bonne entrée en matière ?

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    • Il a l’avantage de ne pas faire partie d’une série kilométrique; c’est aussi un de ses premiers ouvrages, donc je dirais que oui. Par contre, je ne saurais dire s’il est représentatif du reste de son œuvre.

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  2. Perso, j’ai adoré quasiment tous les bouquins de Pratchett, sauf celui-ci…
    Je trouve justement qu’il n’est pas vraiment raccord avec le reste de son travail (sans parler du fait qu’il ne fait pas partie à proprement parler de la série Discworld), qu’il manque le petit je ne sais quoi qui rend ses bouquins si particuliers, et si j’avais découvert l’auteur avec ce livre je n’aurais certainement jamais accroché.

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    • Bienvenue et merci du commentaire!

      Je soupçonne que Strate-à-gemmes est en quelque le brouillon du Disque-monde: c’est son deuxième roman et il ne commence le Disque-monde que deux ans plus tard. Du coup, c’est un peu normal qu’il ne soit pas complètement raccord.

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  3. Suivez le lien pour savoir par où commencer sur le Disque-Monde. Sachez que contrairement à d’autres séries fleuves, chaque roman de Pratchett est complet et (presque) indépendant des autres. Donc l’essayer, ce n’est pas forcément mettre le doigt dans l’engrenage…

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  4. Dans ”Strage-à-gemmes”, j’avais beaucoup aimé le fil conducteur, à savoir la tentation pour un créateur de laisser une trace de lui dans son œuvre. Je me demandais si dans notre monde ça n’était pas pareil (http://www.courtois.cc/blogeclectique/index.php?post/la-taille-de-la-lune-est-elle-une-coincidence ). Sagan a fait ça aussi à la fin de ”Contact” (le livre), plus subtilement.

    Pour le disque monde, plutôt lire le premier (La Huitième Couleur (The Colour of Magic)) , éventuellement le deuxième (Le Huitième Sortilège (The Light Fantastic)), après il faut être accro (je le comprends mais j’ai autre chose à lire).

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    • Hello et bienvenue!

      Pas de souci pour la honte: nous sommes entre gens de bonne compagnie, ça ne se répètera pas.

      Pas au-delà de Twitter, en tous cas. 😉

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  5. Je vais passer rapidement sur celui-là : c’est un des bouquins de Pratchett qui m’a déçu (il y en a eu d’autres, comme Interesting Times, guère intéressant, ou CEUX QUI ONT UN SUJET CENTRAL ASSEZ MORTEL).

    Il faut savoir que dans la série du Disque-Monde, tout n’est pas franchement “raccord” non plus. Les deux premiers sont une sorte de satire de D&D, et ça change pas mal ensuite, bien qu’on soit toujours en principe dans la continuité (l’évolution de l’Unseen University au fil des bouquins est marquante sur ce point).

    Si c’est juste pour se faire une idée, je partirais plutôt sur Wyrd Sisters et/ou Guards ! Guards !

    Je ferais en tout cas l’impasse dans un premier temps sur The Colour of Magic et The Light Fantastic (les deux premiers, donc) qui ne sont pas représentatifs de la série.

    Ah, à lire en VO absolument aussi. Le pauvre gars qui traduit a bien du mal à rendre les subtilités (Ape vs. Monkey, “Ant Hill Inside” et autres joyeusetés du même genre).

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