Total Recall

La séance de cinéma d’hier soir a été précédée des dialogues suivants, d’abord jeudi: “On devait pas aller voir un film ce samedi?” – “Oui, mais j’ai oublié quoi.”; puis vendredi: “Ah, ça y est, je me souviens de ce qu’on voulait aller voir au ciné et c’est normal qu’on est oublié: c’était Total Recall.” Logique.

Si j’étais méchant, je dirais qu’on aurait mieux fait de ne pas s’en rappeler: ce film est plutôt médiocre. En fait, pour être très précis, il est décevant. Il prouve que s’il est possible de faire un bon film avec un blockbuster décervelé, il est beaucoup plus difficile de faire du blockbuster avec un minimum de cerveau, parce que juste un minimum, ce n’est pas assez.

Commençons par ce qui est bien. Ça va être assez rapide, en fait: visuellement, le film est plutôt joli; les effets spéciaux sont réussis et les concepts graphiques du cauchemar urbain aux relents cyberpunk du contexte plutôt bien foutus.

Dommage que ledit contexte ne tienne pas debout une seconde (la guerre qui épargne mystérieusement Londres et tout le nord de l’Europe, mais rase le Canada et l’Amérique latine, le tunnel qui traverse la planète pour aller en Australie, les ascenseurs omnidirectionnels, etc.) et que la plupart des éléments visuels ait été repompés de plusieurs autres films de science-fiction.

Scènes de rue multi-ethniques sous la pluie et bagnoles volantes à la Blade Runner, autoroutes magnétiques et interfaces à la Minority Report, plus bien évidemment tout ce qui a trait au Total Recall originel, celui avec Arnold Schwarzenegger. Pour tout dire, il y a même des bouts où j’ai eu l’impression de voir un épisode particulièrement bancal de Doctor Who.

Il y a un jeu à boire qui circule sur Internet et qui demande de boire à chaque fois qu’apparaît un élément pompé d’un autre film; je le déconseille: c’est un plan à finir en coma éthylique. En fait, le plus gros mensonge du film apparaît au bout de trois secondes, avec le logo de la boîte de production “Original Films”.

L’intrigue – une histoire d’agent secret reprogrammé pour passer pour un homme normal – tient à peu près debout, mais je ne peux pas m’empêcher de penser qu’avec une idée de départ pareil, n’importe quel scénariste un peu moins tâcheron aurait pu en tirer quelque chose de plus tordu. J’aurais aimé voir ce qu’un Satoshi Kon aurait pu en faire (amis du mindfuck, bonsoir!). Là, c’est plus linéaire que mon premier donjon. Qui plus est, l’ensemble est desservi par des acteurs pas spécialement inspirés et des scènes d’actions qui parfois traînent en longueur.

Bon, j’ai vu pire, mais j’aurais franchement aimé voir mieux que ce Total Recall, trop bien fait pour être un vrai nanar, mais trop raté pour être un film correct. Tout n’y est pas à jeter, mais ça reste quand même un film que j’ai trouvé très moyen, voire médiocre.

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10 réflexions au sujet de “Total Recall”

  1. Il te reste l’option d’aller chez Rekall pour te faire implanter le souvenir que tu ne l’as pas vu ?

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  2. Le truc qui m’a énervé, c’est que si l’histoire est partiellement crédible, le monde ne l’est pas une seconde.

    Il y en a un peu marre que Hollywood considère qu’ on peut vendre n’importe quoi avec une étiquette SF. Pas étonnant que le genre soit méprisé du grand public.

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  3. Les échos généraux sur le film vont plutôt dans ton sens. Un énième exemple de reboot inutile destiné à faire fonctionner les studios d’effets spéciaux.
    Un jour, quelqu’un se demandera peut-être à quoi sert le poste “scénaristes” dans la compta.

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    • Les souvenirs que j’ai de l’original ne sont pas particulièrement brillants non plus, je dois dire. Autre chose, peut-être; meilleur, pas sûr…

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      • L’original, c’est un Verhoeven. C’était peu crédible visuellement même à l’époque, mais au moins il y avait des questions intéressantes de posées et une fin ambiguë.

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        • Tout ce qu’à fait Verhoeven ne me plaît pas forcément et ce dont je me rappelle de Total Recall 1991, c’est un truc qui fleurait bon le blockbuster nawak que je n’ai pas vraiment envie de revoir.

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  4. On peut penser ce que l’on veut de l’original avec Schwarzy mais c’est sans doute son meilleur rôle. Des questions sur la réalité et surtout une planète Mars bien rendue. Une société avec des mutants opprimés qui veulent se libérer. Bref toute une lecture assez politique. Mais nous êtions à une période (1970 – 1990 ) qui fut l’âge d’or du cinéa de SF avant que le cinéma hollywoodien ne devienne un média pour adolescent ( la faute à l’installation des cinémas dans les mall à 20 km des centres villes, si bien que le salarié moyen n’avait pas envie forcément d’y aller )

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