« Reprobation », « Consuming Fire » et « Sound », de Catherine Fearns

Les trois romans de Catherine Fearns, Reprobation, Consuming Fire et Sound, peuvent se résumer par : à Liverpool, un inspecteur de police, une nonne calviniste et un chanteur de death-metal combattent le crime. J’avoue, c’est un peu lapidaire, mais je n’ai pas mieux en moins de deux cents mots.

J’ai découvert ces romans au hasard d’un vernissage à la Citadelle, le bar-metal de Genève. En effet, l’autrice, Christine Fearns, habite Genève. Elle est originaire de Liverpool, ce qui explique pourquoi cette ville est remarquablement bien décrite dans les trois romans; c’est presque un personnage à part entière.

Il faut aussi dire que ces livres ont la particularité de mélanger thriller, fantastique et metal. Je n’ai pas besoin de vous rappeler mon amour immodéré pour tout ce qui touche de près ou de loin à l’inclusion de mes styles musicaux préférés dans les littératures de l’imaginaire. En fait, le terme « obsession » fonctionne pas mal non plus.

On a donc l’inspecteur Darren Smith qui enquête sur des cas extrêmement bizarres. Comme, par exemple, un homme retrouvé crucifié sur une plage. Ou des cas de combustion humaine spontanée. Ou un meurtre à l’arme sonique. Assez rapidement, il entre en contact avec Helen Hope, sœur calviniste et docteur en théologie. Laquelle va s’intéresser à Mikko Kristensen, chanteur du groupe Total Depravity.

La raison pour laquelle je les chronique les trois ensemble, c’est d’une part parce qu’ils sont plutôt courts et qu’ils forment une sorte de trilogie qui arrive à une forme de conclusion – même si on l’imagine bien temporaire, à la fin du troisième, Sounds.

Des trois, Reprobation est peut-être le plus « classique ». C’est un récit policier aux allures de techno-thriller, qui parle de manipulations génétiques, mais qui part sur des notions théologiques, comme le concept de péché originel. Ce qui amène au personnage de Sœur Helen et, par le biais de la traditionnelle piste sataniste, vers le groupe Total Depravity et son chanteur, Mikko.

Au niveau narration, il est un peu à part des deux autres et contribue à poser les personnages et l’ambiance de la série.

Consuming Fire démarre lui sur une note directement fantastique et j’avoue que ça m’a quelque peu surpris. Dans les autres tomes, c’est plus subtil; des doutes planent, les explications rationnelles sont presque suffisantes pour expliquer les bizarreries; pas ici. Le fait est que c’est aussi le titre dans lequel apparaît la Prophétie. Oui, du genre méchante, qui tue des gens de façon pas très propre.

Je ne suis pas fan des prophéties. Ça a déjà été utilisé mille douze fois et je disais à un moment que même les scénaristes d’animés avait posé un moratoire là-dessus (je me leurrais, mais passons). Ici, l’intérêt c’est que l’accent n’est pas tant posé sur la prophétie en elle-même que sur les gens qui y croient. C’est cette croyance qui lui donne sa force, sinon c’est juste un vieux texte pas très bien écrit.

Sounds fait revenir Mikko et sa (plus ou moins) joyeuse bande de Norvégiens chevelus sur le devant de la scène, à la faveur de meurtres et d’autres incidents qui semblent liés à des phénomènes acoustiques bizarres. L’inspecteur Darren Smith va aussi y prendre un rôle encore plus prépondérant, d’autant que l’épilogue du précédent tome l’a énormément marqué.

On a un peu l’impression de voir en parallèle un polar sérieux, avec des flics en mode no-nonsense, et un scooby-gang composé de musiciens de death-metal, de satanistes pur jus et d’une théologienne que toute cette histoire semble beaucoup amuser. Jusqu’à un final plutôt impressionnant. Des trois, c’est sans doute celui qui maîtrise le mieux le mélange entre fantastique et non-fantastique.

Globalement, j’ai beaucoup aimé cette série de Catherine Fearns. L’autrice est chroniqueuse musicale et a aussi écrit quelques essais sur le metal; ça se sent. Ses personnages sont aussi très intéressants, loin des caricatures et ancrés dans un Liverpool très réel. On a même droit à un petit voyage en Suisse, pour le tome 2, chez les « faiseurs de secrets », coupeurs de feu et autres rebouteux.

Le plus gros bémol, c’est les variations entre les niveaux de fantastique d’un volume à l’autre – surtout entre le premier et le deuxième tomes qui sont respectivement à un et onze. Il y a aussi quelques variations stylistiques d’un chapitre à l’autre, suivant par qui ils sont racontés, qui ne sont pas toujours très heureuses. Mais rien de tragique.

Si, comme moi, vous voulez plus de metal dans vos romans, je vous conseille donc de vous intéresser à cette série. Ces trois premiers volumes forment un tout narratif qui se lit vite et bien. Et ne vous étonnez pas trop si vous allez chercher sur l’Encyclopaedia Metallum s’il existe un groupe qui s’appelle Total Depravity.

(Spoiler: non. Enfin, pas encore.)

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