Principes davincipunkesques

Mon précédent et séminal article sur le davincipunk a été sans doute un peu léger. Je blâme l’enthousiasme: la bande-annonce de Three Musketeers venait de sortir et je réagissais à chaud. L’enthousiasme étant quelque peu retombé depuis, il est temps de s’interroger sur les éléments du davincvipunk et de voir où piocher des inspirations. Ou, pour être plus précis, de mes inspirations – parce que oui, je pourrais également parler de Assassin’s Creed ou même des Merveilleuses Cités d’Or, mais comme c’est quelque chose que je ne connais pas, je laisse s’y essayer ceux qui connaissent mieux.

Une chose que beaucoup d’amateurs de whateverpunk oublient régulièrement, c’est qu’à l’origine, le cyberpunk jouait beaucoup sur l’opposition entre avancée technologique et recul social (high-tech, low-life); le steampunk, par exemple, joue beaucoup plus sur le côté clinquant de la haute société victorienne. Cela risque d’être aussi le cas du davincipunk, dont l’inspiration première va être les histoires de cape et d’épées classiques, avec ses jeunes nobles désargentés, certes, mais en quête de gloire et d’ascension sociale, plutôt que des gueux des campagnes ou les tire-laines de la Cour des Miracles.

Sans être forcément le point le plus important dans l’absolu, celui qui va le plus facilement attirer l’attention des joueurs (ou des lecteurs) est probablement celui de la technologie. La source évidente des technologies anachroniques est bien évidemment Leonardo da Vinci; le rôliste peut se référer au semi-médiocre, mais amusant supplément The Lost Notebook of Leonardo da Vinci pour Castle Falkenstein ou piocher dans des inventions plus connues comme le char d’assaut, l’hélicoptère ou le planeur.

Cela dit, da Vinci, c’est bien, mais ce n’est pas très récent, si on pose comme période celle des Trois mousquetaires, c’est-à-dire le règne de Louis XIV (grosso modo 1650-1720), c’est près de deux siècles après la mort du génie. Pour cette époque, on peut aussi aller chercher des scientifiques comme Gottfried von Leibnitz et Isaac Newton et s’inspirer de la Trilogie baroque, de Neal Stephenson; certes, c’est juste 3000 pages à lire, mais il y a de la matière.

On peut également chercher au niveau des Chinois ou des Arabes; bon, l’âge d’or de la science arabe est bien loin – genre cinq siècles – mais l’Orient mystérieux, ça paye toujours. Et puis on a des bizarreries, comme un premier “chariot à vapeur” construit à Pékin en 1672 par un missionnaire jésuite. En fait, il y a pas mal d’éléments du steampunk qui sont déjà présents à cette époque, sans être exploités de façon systématique; on peut donc raisonnablement penser que des “déclics” technologiques créent une évolution plus rapide.

Et puisqu’on parle de Newton, ce dernier était passionnée par l’alchimie; à partir de là, quoi de plus naturel que d’ajouter le surnaturel? Alchimie, sorcellerie (la Grande chasse aux sorcières se déroule entre 1560 et 1630, environ), chamanismes amérindien, sibérien ou africain, rien de tel pour quelque peu épicer les aventures. En Europe, il faudra chercher du côté des descendants spirituels de John Dee, occultiste à la cour d’Elizabeth I; c’est un peu tôt pour le Comte de Saint-Germain, mais avec un immortel, sait-on jamais…

Maintenant, on peut aimer ou non le surnaturel, il n’empêche que la fin du XVIIe et le début du XVIIIe siècle marquent le passage d’une science soumise à l’ordre divin à quelque chose qui, plus tard, deviendra le mouvement des Lumières. Il serait dommage de laisser cet aspect de côté. C’est encore un monde où les campagnes sont des enclaves qui vivent encore au Moyen-Âge, là où les villes commencent à entrevoir des débuts de modernité.

(Photo: Vincente Alfonso via Flickr, sous licence Creative Commons Non-Commercial Share-Alike)

Pour soutenir Blog à part / Erdorin:

Blog à part est un blog sans publicité. Son contenu est distribué sous licence Creative Commons (CC-BY).

Si vous souhaitez me soutenir, vous pouvez me faire des micro-dons sur Ko-Fi, sur Liberapay ou sur uTip. Je suis également présent sur Patreon et sur KissKissBankBank pour des soutiens sur la longue durée.

11 réflexions au sujet de “Principes davincipunkesques”

  1. À ma grande honte, j’ai oublié de mentionner comme référence De cape et de croc et ses glorieux modèles, comme Cyrano de Bergerac.

    Répondre
  2. Quelque part, le livre de Cyrano, empires de la lune et du soleil, (pas celui d’edmond rostand)est déjà un peu davincipunk

    Répondre
  3. Pour ajouter une inspiration de plus, il y a la tétralogie de l’Âge de la Déraison de Greg Keyes qui se situe à la même époque mais avec des éléments fantastiques.

    Répondre
  4. Il y aurait aussi probablement moyen de lorgner du côté de l’homme au masque de fer, avec les débuts prématurés de l’électricité. Sherlock Holmes (dernier du nom) constitue également des sources d’inspiration de premier ordre pour les gadgets façon Nicolas Tesla ou Thomas Edison.
    MJ

    Répondre
    • À mon avis, Sherlock Holmes appartient beaucoup plus au genre steampunk, qui est un animal à part. C’est un monde différent, qui est en passe d’être maîtrisé entre les dernières grandes expéditions, la révolution industrielle et des inventions de l’âge moderne. Holmes lui-même est un avatar de la Raison qui n’aurait jamais eu sa place dans un XVIIe siècle encore pétri de sacré.

      Répondre
      • Ce que tu dis est vrai. Note bien cependant que je ne mentionnais que la fée électricité. La mettre dans un contexte bigot ne devrait pas être trop difficile.
        Ça me rappelle même le mystery park (bhouuu!) qui suggérait les débuts de l’électricité chez les égyptiens.
        MJ

        Répondre
  5. Petite question : quelle est la différence entre ton davincipunk et le clockpunk (qui est à la Renaissance et à ses inventeurs, Vinci en tête, ce que le steampunk est à l’ère victorienne) ?

    Répondre

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.