« Game Wizards », de Jon Peterson

Décidément, on aura beaucoup parlé jeu de rôle sur le blog, cette semaine. Ça nous changera. Ahem. Bref, le sujet, aujourd’hui, c’est Game Wizards, le dernier ouvrage de Jon Peterson, l’historien américain du JDR.

L’ouvrage nous parle encore une fois des débuts de D&D, mais sous l’angle de la relation conflictuelle entre ses deux co-créateurs, Gary Gygax et Dave Arneson. Et quand je dis « conflictuelle », je ne plaisante pas: c’est allé jusqu’au procès, cette blague! Ce n’est pas pour rien que cet ouvrage est sous-titré The Epic Battle for Dungeons and Dragons.

Récapitulons: au début des années septante, c’est dans le milieu des wargames historiques à figurines que commence à germer l’idée du jeu de rôle. D’abord avec Chainmail, un ensemble de règles qui introduit des éléments de fantasy.

À l’époque, le TSR de Gary Gygax n’est guère plus qu’un club de joueurs de la grande banlieue de Chicago, qui organise chaque année une petite convention. À cette convention viennent souvent, en quasi-voisins, des joueurs de la région des Twin Cities (Minneapolis et Saint Paul), dont Dave Arneson.

Entre les deux groupes, des interactions se forment et, de ces interactions, naîtront plusieurs idées de jeux, dont Dungeons & Dragons. En 1975, Dave Arneson et plusieurs autres de ses amis vont rejoindre TSR, devenu entretemps une vraie entreprise; il y restera onze mois.

Game Wizards, c’est surtout l’histoire de cette collaboration entre Gary Gygax et Dave Arneson, puis de cette rupture et de la guéguerre qui s’en est suivi.

Autant dire qu’aucun des deux principaux protagonistes n’en sort réellement grandi. Gygax apparaît comme autoritaire, jaloux et incapable de lâcher prise; Arneson semble surtout se caractériser par une pugnacité inversement proportionnelle à sa capacité de travail.

Jon Peterson s’est appuyé sur une quantité impressionnante de sources: magazines et fanzines de l’époque, y compris des bulletins internes, ainsi que les archives de TSR et la correspondance privée de plusieurs des acteurs de l’époque.

Tout au long de la quinzaine chapitres de son ouvrage – chacun couvrant une année, ou presque – il tire de toutes ces sources une image de TSR plutôt contrastée: une bande de passionnés, franchement déconsidérés par le reste de l’industrie, puis rapidement dépassés par un succès inattendu et au-delà de toutes leurs espérances.

Plus joueurs que gestionnaires, les dirigeants de TSR sombrent rapidement dans la folie des grandeurs et la compagnie, également plombée par une tendance au népotisme, sombre presque plus vite qu’elle ne s’était élevée. Quelque part, ça rappelle beaucoup d’exemples plus contemporains.

Autant j’avais adoré les deux premiers ouvrages de Jon Peterson, Playing at the World et The Elusive Shift, autant celui-ci m’a un peu moins passionné.

D’abord parce qu’il ne parle pas tant de jeux, mais beaucoup plus de joueurs – ou, pire, d’auteurs de jeu. Ce sont des histoires de bonshommes, à mon avis pas très intéressants en eux-mêmes. Ensuite parce que ça parle aussi beaucoup de business. Le truc chiant avec des tableurs Excel – même s’il n’y en avait pas encore à l’époque.

Cela dit, Game Wizards m’a juste un peu moins passionné. Toutes les histoires autour de la création de Dungeons & Dragons sont très intéressantes. même – surtout, peut-être – près de cinquante ans plus tard. Disons que si c’est l’aspect game design qui vous parle plus, il est plutôt anecdotique.

Pour soutenir Blog à part / Erdorin:

Blog à part est un blog sans publicité. Son contenu est distribué sous licence Creative Commons (CC-BY).

Si vous souhaitez me soutenir, vous pouvez me faire des micro-dons sur Ko-Fi, sur Liberapay ou sur uTip. Je suis également présent sur Patreon et sur KissKissBankBank pour des soutiens sur la longue durée.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.