“À la Moldue”, de Camille Gillet

Bonjour, mon nom est Alias et j’ai lu une fanfic Harry Potter (BONJOUR ALIAS!). Il s’agit de À la Moldue, signée Camille Gillet et diffusée sur Wattpad. Non seulement ça, mais 1) je l’ai grave kiffée, 2) je vais la chroniquer alors qu’elle est en cours de publication et 3) je vais utiliser l’expression “grave kiffer” alors que j’ai plus de cinquante ans.

Ça fait beaucoup, hein? Et je n’ai pas encore bu, c’est dire!

La raison de ce coup de folie passagère – si on vous demande, c’est mon explication officielle – c’est que j’ai vu passer ce texte sur Wattpad et que son accroche m’a amusé:

“Tout ceci ne serait pas arrivé si nous avions utilisé Google Map, Severus…”

Le cœur de l’histoire, c’est l’introduction d’une Moldue – pour ceux qui ne sont pas fans d’Harry Potter, une non-sorcière – au sein de Poudlard, l’école de sorcellerie, après la fin du quatrième tome.

Ladite Moldue – une écrivaine nommée Jane Smith – va se retrouver un peu perdue dans une école qui est déjà fondamentalement dangereuse pour ses propres élèves, à devoir faire des cours sur la culture moldue à des adolescents particulièrement réticents, le tout au milieu d’une guerre qui, précisément, se joue sur la notion de pureté de la lignée des sorciers.

Alors bon, c’est une fan-fiction et elle contient pas mal des clichés du genre. Par exemple, je doute que le fait que Jane soit une autrice coincée dans des jobs à la con soit un hasard. Je ne voudrais pas dire du mal de Camille, mais il me semble que son blog Pressenter parle pour elle.

Il n’est pas très étonnant non plus d’y trouver une romance entre la Moldue et un beau ténébreux. Bon, le “beau ténébreux” en question, c’est Severus Snape, qui est bombardé chaperon du “Professeur Smith” par un Dumbledore très amusé par la situation. Et la romance en question tient surtout du quiproquo. Surtout. Presque.

Il y a cependant pas mal de choses qui tirent cette fanfic vers le haut du panier proverbial, dans un genre où la Loi de Sturgeon semble être encore plus cruelle que d’habitude.

D’abord, c’est bien écrit. Oh, certes, il y a quelques maladresses, notamment un abus manifeste d’épithètes et de surnoms plus ou moins bien choisis pour les personnages. C’est typiquement le genre de béquille qui est utilisée pour éviter les répétitions, mais je trouve ça lourdingue à la longue, rarement utile et, parfois, ajoutant plus à la confusion.

Il faudrait aussi un passage par un correcteur orthographique. Rien de majeur, mais il y a quelques typos qui font quand même tache dans l’ensemble. Disons que, là encore, selon les standards de Wattpad, on est quand même très très haut.

Ensuite, le gros intérêt de cette fanfic, c’est de proposer une alternative intéressante et crédible à l’histoire du célèbre sorcier. Qui a dit “uchronie”? Moi. Parce que certains mécanismes fonctionnent pareil: introduction d’un “grain de sable”, en apparence mineur, dans la machine et développement de conséquences en chaîne, de plus en plus importantes, façon effet papillon.

Je ne veux pas en révéler trop de l’intrigue, surtout qu’il y a eu un certain nombre de moments “Whôpiting!”. Plus des passages de franche rigolade quand Snape se retrouve en immersion dans le Londres moldu avec obligation de passer inaperçu. Oui, “Snape” et “inaperçu” dans la même phrase – qu’est-ce qui pourrait mal tourner?…

Enfin, un des éléments que j’aime beaucoup dans cette histoire, c’est la caractérisation des personnages, avec beaucoup de nuances. On a par exemple un Dumbledore qui, sous ses dehors de papa-gâteau – à deux doigts de la crise de diabète majeure – s’avère être un manipulateur de première bourre.

Lucius Malefoy prend également méchamment du galon dans le genre animal politique, sans parler de Snape lui-même, qui doit jongler avec ses deux allégeances quitte à devoir faire des grosses omelettes. Et puis même Harry Potter évolue de façon intéressante, c’est dire!

Jane évite l’écueil de la Mary-Sue – autre plaie des fanfics –. Elle est même particulièrement pathétique sur pas mal de points, mais elle est loin d’être inutile.

À l’heure actuelle, À la Moldue fait déjà plus d’une quarantaine de chapitres – et pas des petits. Cela dit, comme mentionné, elle n’est pas encore terminée: on en est au premier tiers du sixième tome de la saga, environ. Il y a donc de quoi faire et ce n’est pas fini!

Et pour conclure, j’ai grave kiffé. C’est très drôle à lire, c’est un décorticage en règle de l’univers de Harry Potter, mais fait avec amour – on sent quand que, dans “fanfic”, il y a “fan” – et c’est bourré de bonnes idées réutilisables pour des rôlistes ou d’autres auteurs et trices.

Par contre, un dernier truc: si vous êtes auteur de fanfic, inutile de faire le siège de ma boîte mail pour me faire lire votre Œuvre au prétexte que j’ai aimé celle-ci. Ce n’est pas un genre que j’apprécie; j’en ai certes lues quelques-unes (surtout dans le monde d’Elfquest) et, avec un minimum de mauvaise foi, on peut dire que Progressions en est une. Mais, statistiquement, je doute que vous parveniez à m’intéresser.

À moins, bien entendu, que vous ayiez une accroche particulièrement bien sentie. La preuve ici: c’est important.

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3 réflexions au sujet de ““À la Moldue”, de Camille Gillet”

  1. Merci beaucoup !

    J’étais pas mal flippée par l’exercice, très peur de voir remonter des défauts autres que ceux identifiés et ingérés (et tu l’as fait avec bienveillance en plus).

    L’histoire de la construction de cette ff est totalement basique en plus, on est clairement sur un truc décidé sur un post-it, avec une facilité scénaristique bateau quant au choix professionnel du perso principal (même si, à la base, Jane devait être analyse financière. Ce qui prête à sourire quand on “connaît” le personnage). Je me retrouve un peu dépassée par le bordel. J’espère que la fin ne sera pas alambiquée ou trop décevante.

    Parce que le plot, est effectivement très simple, c’est une bête histoire d’amour avec du bordel autour. Il doit me rester une quizaine de chapitres, je pense ? Bref, j’espère en voir la fin.

    Merci encore, c’est un drôle d’exercice, un drôle d’effet. J’vais partager narcissiquement ton billet, et l’impression est à la fois gênante et grisante à le faire.

    Bravo ^^

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  2. Whôpiting !
    Je viens de lire une chronique d’une fanfiction, alors que je n’en ai jamais lu et n’ai pas prévu de le faire, et… j’ai aimé ça au point d’avoir presque envie d’aller la lire. Je tiens par ce commentaire à dénoncer ce procédé démoniaque.

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